Un chantier très tendu sur le pont de l'île de Ré
Charente-Maritime -
Jean-Sébastien Thomas
En septembre dernier, quelques jours après l'effondrement du viaduc Morandi à Gênes (Italie), un câble de précontrainte cassait dans le tablier du pont de l'île de Ré. Inauguré en 1988, l'ouvrage de près de 3 km de long, réalisé par Bouygues Travaux publics, relie le quartier de La Pallice, à La Rochelle, à l'île de Charente-Maritime. Bien qu'aucun péril ne menace le pont, une intervention était nécessaire.
Le département a alors lancé une procédure d'urgence. Trois entreprises - Eiffage, Bouygues et Freyssinet - ont concouru. C'est cette dernière, associée à sa filiale Sixense, qui a décroché le marché. « Le groupement pouvait intervenir plus rapidement que les autres entreprises et n'exigeait aucune contrainte supplémentaire quant à la circulation sur le pont », explique Pierre-Marie Audoin-Dubreuil, directeur général adjoint des services du département de la Charente-Maritime.
C'est un « incident de chantier », autrement dit une erreur humaine, qui semble à l'origine de cette rupture d'un des 218 câbles de précontrainte tendus dans le tablier du pont. En effet, de la mousse de polyuréthane a été coulée à la place du coulis de ciment qui sert à maintenir les 133 fils composant le câble. « La présence de cette mousse a entraîné le stockage d'humidité, puis l'érosion des fils, diagnostique Pierre-Marie Audoin-Dubreuil. La rupture s'est produite à 50 cm de la tête d'ancrage. »
Travaux de sécurisation.
Avant d'intervenir sur le câble en question, l'un des 36 que compte le viaduc n° 2 situé à quelques centaines de mètres de l'entrée du pont côté île, Freyssinet s'est assuré que ses techniciens ne courraient aucun risque. Pour ce faire, les 70 câbles situés entre l'entrée et le point de rupture ont été inspectés. Des sondeurs acoustiques ont été installés par Sixense afin de guetter d'éventuelles ruptures notamment au niveau des têtes d'ancrage.
« Au fur et à mesure que nous progressions dans l'ouvrage, nous avons sanglé les câbles entre eux afin d'éviter le “coup de fouet” si l'un d'eux cassait. La tension d'un câble est d'environ 400 tonnes et une trentaine de techniciens étaient sur place. Nous ne voulions pas d'accident », insiste Nicolas Coevoet, ingénieur travaux chez Freyssinet. Au total, plus de 2 000 sangles ont été ainsi disposées, à raison d'une tous les mètres. Démarrés début décembre, ces travaux de sécurisation se sont achevés fin janvier.
Tout juste engagée, l'opération pour changer les 250 m de câble est assez simple : « La gaine est entrée dans le pont par tronçons de 6 m, qui sont ensuite assemblés entre eux. Puis nous passons les fils dans la gaine où ils sont tendus et immobilisés grâce à du coulis de béton », poursuit l'ingénieur. L'opération doit durer entre deux et trois semaines. Le matériel de détection de rupture, caméras et sondes, restera sur place afin de détecter d'éventuelles anomalies en temps réel. L'ensemble du chantier demande un investissement de 2,7 millions d'euros, financé grâce à l'écotaxe perçue à l'entrée du pont.
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