Au Centre Pompidou-Metz, l’architecture ne manque pas d’air
JACQUES-FRANCK DEGIOANNI | le 03/02/2021 | Arata Isozaki , Metz, Exposition, Centre Pompidou
L’air est un matériau d’architecture à part entière. La preuve avec l’exposition Aerodream, «Architecture, design et structures gonflables»...
De pierre, de terre, de fer ou de béton ; l’architecture est souvent pesante, comme l’air du temps en cette période sombre. Et d’air il sera précisément question dans l’exposition qui ouvrira [mais quand?] jusqu’au 23 août 2021 au Centre Pompidou-Metz.
Au commencement était le pneuma - souffle, respiration, âme, cœur, esprit ; et sans doute un peu tout cela à la fois - et l’enveloppe, métaphore de la peau, de la finitude du corps, mais aussi de son extension au travers de la montgolfière et des aérostats. L’histoire des gonflables est imprégnée de cette symbolique, comme elle l’est de l’histoire industrielle, militaire et spatiale : ballons dirigeables, leurres, radômes, ballons-sondes de la Nasa, etc. Des architectures de la mobilité, sans fondations ; des enveloppes climatiques protectrices, en phase avec la nature, loin des locaux climatisés des bureaux.
Coolitude
L’apparition de nouveaux matériaux (caoutchouc et dérivés, plastiques, etc.) a démultiplié les applications possibles de ces structures que des architectes comme Victor Lundy, Walter Bird, Frei Otto ou Cedric Price exploiteront avec brio.
En mai 1967, un colloque sur le sujet fait événement à Stuttgart et constitue la référence vers une nouvelle architecture légère, mobile et modulable, auprès de collectifs comme Archigram, Coop Himmelb(l)au etc. et des architectes et/ou artistes tels Graham Stevens, Panamarenko, Jean Aubert, Hans Walter Muller, etc. Quelques expositions «mythiques» populariseront à l’international le gonflable : musée d’art moderne de la Ville de Paris (1968), pavillons de l’Exposition universelle d’Osaka (1970), Documenta 4 et 5 de Kassel (1968 et 1972).
Dès lors, le gonflable gagne une image de coolitude en adéquation avec le pop art et prend corps au travers de multiples déclinaisons : mobilier, habitation, structures expérimentales, etc. Le gonflable acquiert même une fonction critique envers l’urbanisme et la société, dimension dont s’emparent des artistes comme Piero Manzoni, Yves Klein, Andy Warhol et d’autres pour intervenir dans l’espace public au travers de performances.
Come-back
La crise pétrolière de 1973 sonne le glas du tout-plastique et le gonflable s’évapore… pour mieux faire son come-back depuis une dizaine d’années, avec l’apparition de nouveaux matériaux et technologies plus respectueux de l’environnement. Un revival qui séduit des architectes comme Diller Scofidio + Renfro, Nicholas Grimshaw, Arata Isozaki, Herzog & de Meuron, Snøhetta ; et des artistes comme Anish Kapoor. Des recherches morphologiques et constructives qui se poursuivent, via les expériences d’Achim Menges, de Kengo Kuma, de Mad Architects, de Selgascano et autres…
Aerodream / Architecture, design et structures gonflables
Une co-production du Centre Pompidou-Metz et de la Cité de l’architecture et du patrimoine, avec le soutien du Centre Georges-Pompidou.
Commissaires :
Frédéric Migayrou et Valentina Moimas, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle, Centre Pompidou.
Stéphanie Quantin-Biancalani, conseiller scientifique et conservateur, responsable de la collection d’architecture moderne et contemporaine de la Cité de l'architecture et du patrimoine.