
Une tour londonienne qui monte, qui monte…
Marie-Douce Albert | le 17/07/2014 | Architecture, Travail, IGH, Sécurité et protection de la santé, Europe
En Grande-Bretagne, un concours d’idée appelait à imaginer un « gratte-ciel organique », capable de croître dans le temps. L’agence parisienne Chartier-Corbasson Architectes a pensé que l’immeuble de bureaux pouvait en outre s’auto-générer, grâce au recyclage de ses déchets.
Pourquoi une tour ne pourrait-elle pas s’élever au gré de la demande immobilière et de la capacité d’investissement ? Telle était la question posée dans le cadre d’un concours d’idées lancé par SuperSkyscrapers. L’organisme britannique qui promeut la réflexion sur la grande hauteur invitait à imaginer un « gratte-ciel organique » (« organic skyscraper ») à Londres. S’emparant du sujet, Chartier-Corbasson Architectes a encore poussé la difficulté : l’agence parisienne a suggéré que cette tour de bureaux évolutive pourrait aussi produire le matériau nécessaire à sa croissance et a, pour l’occasion, décroché une mention spéciale du jury (pour découvrir tous les projets lauréats et mentionnés, cliquez ici ).
Les architectes Karine Chartier, Thomas Corbasson et leur collaboratrice Lina Jaïdi, avec le groupe VS-A spécialisé dans la conception d’enveloppe de bâtiments, ont en effet considéré que la population d’une tour produit en une année suffisamment de déchets recyclables pour produire « une surface de façade équivalente » à celle qu’elle occupe. Ainsi la somme de ses bouteilles de plastiques vides et de ses papiers usagés servirait à fabriquer les panneaux isolants nécessaires à sa réalisation. « En revanche, on ne sait pas produire de verre de construction à partir de verre recyclé », remarque Thomas Corbasson.
Grand mikado
La tour organique serait dès lors capable de s’auto-générer « comme le corail » puisque la matière récupérée viendrait s’agglomérer sur un squelette en tubes en acier, sorte de grand mikado évoquant les échafaudages asiatiques en bambou. Cette solution structurelle autorise en effet une construction par étapes du bâtiment. Et « les calculs de VS-A ont démontré que cela tenait », assure Thomas Corbasson.
Pour l'architecte, la proposition n’est en rien idéaliste : « le concours prévoyait de récompenser d’avantage la créativité que la faisabilité mais je ne vois pas pourquoi l’une exclurait l’autre. » L’agence a donc également réfléchi aux modalités du chantier, prévoyant qu’une telle opération dans la durée, supposait d’éviter l’usage de grues. La tour se construirait de l’intérieur, le noyau central des ascenseurs jouant alors un rôle essentiel de monte-charge. La zone de chantier serait située dans les étages supérieurs, au-dessus de plateaux de bureaux occupés dès la fin de leur aménagement, et pourrait accueillir des centrales de retraitement des déchets de manière à limiter la noria de camions autour du bâtiment.
Si le concours d’idées situait précisément le gratte-ciel organique dans la capitale britannique, Thomas Corbasson estime que leur modèle est transposable en d’autres lieux. « Enfin ce projet est réaliste parce qu’il présente un modèle économique adapté à notre époque », renchérit-il. Un dernier argument avec lequel il espère séduire des investisseurs.