Une nef géante en verre structurel suspendu

LE CHANTIER La nef du musée d'Art moderne et contemporain de Strasbourg. LE PROGRAMME Des normes antisismiques pour la structure, un vitrage isolant pour les façades, la recherche d'une transparence maximale. LES SOLUTIONS La technique du verre structurel suspendu avec double vitrage usiné et traitement particulier des angles.

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Pièce maîtresse du futur musée d'Art moderne et contemporain (MAMC) de Strasbourg, sa « nef » s'assimile à une gigantesque « rue intérieure ». Elle a été imaginée par l'architecte Adrien Fainsilber dans un souci de transparence maximale, « comme un espace de transition entre le musée et la ville », une sorte de « vaste espace clos à ciel ouvert ». Alors que la façade du MAMC est résolument opaque côté ville, la nef est largement ouverte sur la cité, les berges de l'Ill toute proche et le quartier historique de la Petite-France. Elle offre 2 350 m2 de surface vitrée en façade et 1 300 m2 en toiture. Lieu de rencontre, d'accueil et de liaison, la nef assure l'articulation entre les différentes salles d'expositions réparties entre les deux niveaux principaux. Un escalier mécanique intégré à la paroi, doublé d'un système léger de passerelles et de coursives, permet une bonne circulation intérieure. Quelques oeuvres d'art de grande échelle seront disposées à l'intérieur, même si la fonction essentielle de cette nef est, par son volume et ses caractéristiques, de mettre en évidence la logique du parcours muséal. On y entrera en accès libre, depuis une cour intérieure, par des sas tambours en acier laqué. La pente unique de sa couverture marque un point de repère visuel significatif depuis les abords de la rivière, et cela d'autant plus que l'arête du faîtage constitue le point culminant du musée. Conçue par le bureau d'études RFR, cette longue galerie de verre s'étend sur 10 m de large, 104 m de long et 25 m de haut. Elle est construite selon les principes de verre structurel déjà mis en oeuvre par l'association RFR-Fainsilber pour les serres de la Cité des sciences et de l'industrie de la Villette à Paris.

La nef du musée d'Art moderne et contemporain de Strasbourg a cependant été assortie d'innovations liées aux exigences techniques locales qui imposent l'application des normes antisismiques pour la structure et l'utilisation du vitrage isolant pour les façades en raison du climat rigoureux alsacien et de la climatisation intégrale du musée.

Charpente tubulaire en acier carbone

Afin de résister aux éventuelles contraintes sismiques, la charpente tubulaire en acier carbone est composée de vingt-trois cadres encastrés de 8 m de côté qui forment une ossature rigide. L'ouvrage est divisé en trois sections d'environ 35 m, séparées par des joints de dilatation. La taille des éléments (diamètre 324 mm) interdit tout montage préalable en atelier. L'ensemble des encastrements a donc été réalisé sur site par soudure des tubes sur des croix en acier moulé. Il en va de même de toutes les pièces d'ancrage sur le gros oeuvre et des pièces d'appui en console.

Pour rationaliser la production et minimiser le nombre de moules, certaines pièces ont été usinées après démoulage.

La charpente métallique principale est revêtue d'une peinture métallisée à oxyde de fer micacé. Son application s'est révélée délicate en raison des intempéries et de nombreuses reprises dues aux soudures réalisées sur le chantier.

Le principe du verre structurel suspendu a été retenu pour garantir le maximum de transparence aux façades. Dans chaque cadre de 8 X 8 m, un ensemble de seize panneaux de verre est attaché - en chaîne quatre par quatre - à la membrure horizontale supérieure par des points rotulés (voir graphique). Il n'y a donc pas de cadre de vitrage. L'effort vertical, lié au poids propre de la façade, passe dans le plan du vitrage et est ramené à la poutre supérieure par l'intermédiaire d'attaches munies de ressorts. Les charges horizontales, d'ordre climatique (vent en pression et dépression), sont reprises par des poutres en câbles d'acier inoxydable précontraints, tendues entre les membrures verticales de chaque cadre, sur des écarteurs en acier inoxydable moulé, eux-mêmes fixés sur l'ossature principale. Pour éviter toute flexion dans le verre au droit des appuis, les fixations ponctuelles sont rotulées.

Par rapport au chantier des serres de la Villette, la nef du MAMC de Strasbourg innove par son emploi du double vitrage suspendu et par le traitement des angles. Le produit verrier, fabriqué par l'entreprise allemande Seele, est un vitrage isolant composé de deux verres percés et trempés qui reçoivent ensuite leurs pièces de fixation par assemblage en usine. « L'utilisation de poutres auvents en câbles précontraints pour des façades suspendues de grande hauteur engendre en général des déplacements assez importants au droit des arêtes. Il était donc important, tout spécialement dans le cas d'un double vitrage, d'éviter le phénomène de bâillement dans les angles », souligne Matthieu David, architecte en charge du projet chez RFR. Les panneaux d'angle ont donc été rendus indépendants des façades courantes, et collés entre eux sur site pour former des équerres rigides.

Les joints courants entre panneaux de vitrage sont en silicone gris de 12 mm d'épaisseur appliqués à la pompe. Les joints spéciaux placés entre deux modules de 8 x 8 m sont des joints silicone extrudés de 50 à 100 mm. Collés sur la tranche du verre, ils assurent une parfaite étanchéité. Le choix de la couleur grise répond à la volonté d'affiner et de renforcer la lecture de la trame en jouant sur le contraste avec le noir des intercalaires des panneaux de vitrage isolant.

La couverture est constituée d'un pan unique incliné de 25°. Elle est couverte de feuilles d'acier inoxydable plombé et posé à joint debout de façon traditionnelle. Un plafond acoustique suspendu doit compléter la couverture. Il servira à assourdir l'ambiance réfléchissante liée à l'importance du volume. La ventilation de la nef s'opère par une série de ventilateurs situés en partie haute des façades.

Montage par échafaudage périphérique

« Le haut niveau de préfabrication des éléments verriers ainsi que la répétitivité des éléments structurants ont contribué à simplifier le montage de l'ouvrage sur site », poursuit Matthieu David. Cependant, les supports béton étant parfois largement hors tolérance, plusieurs ancrages ont dû être adaptés. Pour assurer le bon réglage du support, le montage s'est effectué depuis un échafaudage périphérique. La mise au point du système de vitrage, hors DTU, a nécessité plusieurs essais au CSTB dans le cadre de l'Atex (appréciation technique expérimentale). Le système d'accès à toutes les surfaces de la nef a été conçu dès les premières études. Composé de deux ponts roulants motorisés, l'un à l'intérieur, l'autre à l'extérieur, il permet d'effectuer l'entretien et le nettoyage de l'ouvrage. Morceau de choix du chantier du MAMC de Strasbourg, la construction de la nef aura nécessité plus d'un an de travaux. Il faudra attendre l'automne 1997, date de la livraison programmée du musée, pour pouvoir la visiter.

Revêtement extérieur : granit rose et béton de résine blanc

Les volumes des principaux bâtiments du MAMC de Strasbourg sont recouverts de granit rose, dit « rose de la clarté », en provenance de Bretagne, ou de panneaux de béton de résine blanc non poreux. L'architecte a voulu jouer sur le contraste des couleurs et des textures pour rappeler l'architecture traditionnelle strasbourgeoise. Les mêmes matériaux se retrouvent en vis-à-vis à l'intérieur de la nef, ce qui assure une certaine continuité architecturale. Les pierres de granit sont fixées, en intérieur comme en extérieur, à l'aide d'agrafes.

FICHE TECHNIQUE

Maître d'ouvrage : ville de Strasbourg.

Maître d'ouvrage délégué : Sers.

Maître d'oeuvre : Adrien Fainsilber.

Bureau d'études techniques : OTE Ingénierie.

Bureau d'études pour la nef : RFR.

Bureau de contrôle : Socotec.

Entreprises : SMB (charpente métallique), Seele (façades), AIS (systèmes d'accès), Soprema (couverture, faux plafond).

Coût : 18 millions de francs.

Photos :

1. La nef comporte 2 350 m2 de façade et 1 300 m2 de toiture en verre.

2. Pour obtenir la plus grande transparence possible, on utilise le verre structurel.

3. La charpente métallique revêtue d'une peinture métallisée comporte des cadres de 8 x 8 m.

4. Les efforts horizontaux sont repris par des poutres en câbles d'acier inoxydable précontraints tendus entre les membrures verticales de chaque cadre.

5. Les panneaux d'angles, indépendants des surfaces courantes, sont collés entre eux pour former des équerres rigides.

6. Les vitrages comportent deux verres percés et trempés attachés quatre à quatre sans cadre.

Schémas : Fixations

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