Une icône pour le Grand Paris
Beau. C'est ce simple adjectif qui revient le plus souvent pour qualifier le projet privé de tour de bureaux "Triangle" qui sera édifié au parc des Expositions de la porte de Versailles. Financé par Unibail-Rodamco et signé Herzog et de Meuron, ce projet devrait voir le jour en 2012.
Jean-Philippe Defawe
Jeudi dernier lors de la présentation du projet à la presse, le maire de Paris, Bertrand Delanoë a trouvé des accents lyriques pour défendre ce premier des six sites choisis pour construire en "hauteur" à Paris et dépasser le plafond de 37 mètres du Plan local d'urbanisme. "J’ai l’intuition que Jacques Herzog et Pierre de Meuron vont accomplir - pour ce temps, car ils sont jeunes - la plus belle de leur œuvre. Certes, il y a toujours une part de subjectivité, mais pour moi ce projet est d’une beauté inouïe", a-t-il insisté à propos de cette pyramide très effilée (200 mètres à la base et entre 180 et 200 mètres de hauteur) et toute en transparence.
La beauté n'est plus tabou !
Un bel hommage auquel Jacques Herzog a été d'autant plus sensible qu'il déplore une lente disparition de la beauté dans l'architecture au profit du fonctionnel. "C’est très courageux de votre part" a-t-il adressé au maire de Paris. Vous êtes le seul homme politique à oser utiliser le mot beauté. Or on a malheureusement oublié que la beauté est fondamentale dans notre vie et l’architecture, elle aussi, a oublié d’utiliser ça. Je constate souvent qu'il est presque défendu aujourd’hui de parler de beauté au risque de nous renvoyer uniquement à son côté superficiel. Mais la beauté est toujours une complexité qui permet d’intégrer tous les besoins d’un être humain dans le bâtiment. Dans le modernisme, l’architecture s’est réduite elle-même à des fonctions. Il faut réintégrer l'architecture afin qu'elle puisse jouer tout son potentiel pour embellir notre vie".
Un signal pour le Grand Paris ancré dans son quartier
Pour Bertrand Delanoë, "la beauté de ce projet est née de l’intégration à une ville et à un quartier". "Il y a une prouesse technologique, mais aussi une créativité qui part du lieu. Car si l'on a abouti à cette pyramide, à cette disposition au sol, c’est que le génie créatif des architectes est parti du lieu duquel va naître cette œuvre d’art." "Le triangle deviendra l'un des lieux majeurs de Paris Métropole. Il apparaîtra comme une silhouette remarquable dans le système d'axes et de monuments de la ville" confirme Jacques Herzog.
Sa volumétrie a également été pensée à l'échelle du quartier. "La forme triangulaire lui permet de ne pas projeter d'ombre sur les bâtiments voisins" détaille l'architecte. "Ce triangle est pensé comme un morceau de ville que l'on aurait fait pivoter et placé verticalement. Il est découpé par un réseau de circulations verticales et horizontales de capacités et vitesses diverses. Tels les boulevards, les rues et les passages plus intimes d'une ville, ces circulations découpent la construction en îlots de forme et de taille variables (...) Ce n'est pas un bâtiment sur dalle, dans la tradition des grandes tours qui créent une zone un peu étrange à la base. Au contraire, ce bâtiment permet de continuer la vie urbaine, au niveau de la rue avec des restaurants, des bars, etc." explique Jacques Herzog.
Cette volumétrie simple et compacte, qui limite l'impact au sol, et son exposition devraient également permettre d'utiliser les apports énergétiques solaires et éoliens. Un impératif pour le maire de Paris qui exige que le projet "obéisse strictement aux règles du plan climat de Paris".
Plus de trente ans après la Tour Montparnasse (210 mètres), treize ans après la BNF (80 mètres) et 18 ans après la Tour Cristal du Front de Seine (98 mètres), cette tour iconique devrait doter la métropole parisienne d'un signal fort, comme la tour Eiffel l'a été en son temps.
Le premier coup de pioche pourrait avoir lieu dans 18 mois, après un "processus d'information et de concertation" de la mairie prévu à partir du 15 octobre.
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