Projet de loi sur l'artisanat : ça coince toujours sur le régime de l'auto-entrepreneur
Le projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (TPE) a été présenté le 21 août en conseil des ministres. Il répond, sur plusieurs points, aux demandes des artisans du bâtiment. Mais ne tranche pas la question de l'auto-entrepreneur. La Capeb appelle d'ores et déjà à une journée de mobilisation le 13 septembre.
Florent Lacas
Donner aux très petites entreprises un socle solide pour assurer leur croissance : voici le principal objectif du projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (TPE) présenté en conseil des ministres le 21 août par Sylvia Pinel, ministre de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme. Il devrait être débattu au Parlement lors de la première quinzaine de janvier 2014.
Premier point positif pour l'artisanat du bâtiment : le projet de loi vise à supprimer la notion d'artisan "qualifié". Une appellation qui sous-entendait que les artisans "tout court" ne possédaient pas de qualifications. Le texte prévoit donc que seules les personnes qui "peuvent justifier d'une qualification professionnelle, par un diplôme ou par une expérience effective dans un métier artisanal", pourront se prévaloir de la qualité d'artisan. Le texte instaure en outre un contrôle effectif direct par les chambres de métiers. Les corps de contrôle habilités (inspection du travail, impôts, douanes, organismes de sécurité sociale...) pourront vérifier la détention des assurances obligatoires en fonction du métier et des travaux réalisés.
Le projet de loi prévoit également de rapprocher les différents régimes d’entreprises individuelles. Les formalités administratives, juridiques et fiscales du régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) seront simplifiées. Seul l’EIRL permet la protection du patrimoine personnel de l’entrepreneur mais ce régime restait jusqu’ici difficile d’accès.
Auto-entrepreneur : le seuil de chiffre d'affaires reste à préciser
Mais le point le plus attendu de ce projet de loi concernait la modification du régime de l'auto-entrepreneur. Aujourd'hui, toute personne réalisant jusqu'à 32 600 euros de chiffre d'affaires annuel dans les services (donc, par exemple, dans le bâtiment) peut bénéficier de ce régime avantageux. Le 12 juin dernier, lors de la présentation en conseil des ministres de la future réforme du régime de l'auto-entrepreneur (lire notre article), Sylvia Pinel indiquait vouloir abaisser le seuil de chiffre d'affaires à 19 000 euros. Et introduire une limite dans la durée, en obligeant l'auto-entrepreneur qui dépasse ce seuil deux années de suite à basculer vers le régime de droit commun.
Mais, comme la presse l'a révélé il y a quelques jours (voir article), si le principe d'un seuil de chiffre d'affaires est maintenu dans le projet de loi présenté le 21 août, le texte ne précise pas son montant. Il indique qu'il équivaudra à une année de Smic, soit un peu plus de 17 000 euros. "Le niveau de seuil à 19 000 euros est aujourd'hui maintenu, mais les députés pourront faire des propositions, a précisé Sylvia Pinel. Nous prendrons les meilleures décisions pour éviter les effets de seuil qui pourraient exister lorsqu'un auto-entrepreneur rejoint un régime d'entreprise individuelle classique."
Le niveau de chiffre d'affaires annuel sera donc fixé ultérieurement par décret. Pour trancher, le gouvernement s'appuiera, entre autres, sur les travaux d'une commission présidée par le député PS Laurent Grandguillame, qui sera mise en place "dès la rentrée" pour faire des propositions de simplification et d'harmonisation des différents régimes d'entreprise individuelle. "Les recommandations qui seront formulées seront prises en compte dans le débat parlementaire, qui s'engagera début 2014. Le régime de l'auto-entrepreneur doit jouer son rôle de tremplin vers la création d'entreprise, et ne pas créer de distorsion de concurrence ou porter atteinte au droit du travail", a assuré Sylvia Pinel lors d'une conférence de presse.
La Capeb appelle à la mobilisation le 13 septembre
La Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) voit quelques avancées dans ce projet de loi, notamment la mise en place de critères plus sélectifs pour obtenir la qualité d'artisan et la clarification sur la formation professionnelle continue des travailleurs indépendants, dont ne pourront désormais bénéficier que les professionnels réellement en activité. La Capeb le juge toutefois loin d'être satisfaisant, en particulier sur la proposition de réforme du régime de l'auto-entrepreneur.
L'organisation professionnelle a d'ores et déjà appelé à une mobilisation de ses adhérents le 13 septembre, pour protester contre le maintien du régime de l'auto-entrepreneur dans les métiers du bâtiment. "Le maintien du principe d'un seuil de chiffre d'affaires, quel que soit son niveau, ne protège pas des dérives observées actuellement, ni de la concurrence déloyale dont souffrent les artisans du bâtiment", indique l'organisation. La Capeb demande donc toujours que le bâtiment soit exclu de ce régime.
La Fédération française du bâtiment, par la voix de son président Didier Ridoret, est sur la même ligne : "Nous demandons toujours l'exclusion de ce régime des métiers du bâtiment, explique-t-il. Nous savions déjà que le plafond de chiffre d'affaires de l'auto-entrepreneur allait être fixé par décret. La présentation du plan n'apporte donc pas d'élements nouveaux sur ce point", a-t-il précisé au Moniteur. Didier Ridoret compte bien plaider à nouveau la cause des entrepreneurs du bâtiment à l'occasion des travaux de la commission "Grandguillaume".
Rappelons que selon l'Inspection générale des services (avril 2013), dans le cadre des travaux de construction spécialisés, les auto-entrepreneurs réalisent 27% du chiffre d'affaires des travailleurs indépendants.
Les autres propositions du projet de loi relatif aux TPELe projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux TPE, présenté le 21 août par Sylvia Pinel, contient en outre plusieurs mesures visant à soutenir le développement des TPE du commerce et de l'artisanat. Hormis celles évoquées plus haut, concernant la qualité d'artisan et l'auto-entrepreneur, en voici l'essentiel :
Maîtriser la hausse des loyers commerciaux :
- Limiter à 10% par an l'augmentation des loyers commerciaux.
- Remplacer l'emploi de l'Indice du coût de la construction pour définir les loyers, par l'Indice des loyers commerciaux, tout en permettant d'autres références comme l'Indice des loyers des activités tertiaires.
- Obliger à établir un état des lieux d'entrée et de sortie.
- Annexer au bail un inventaire des charges locatives revenant à chacune des parties (locataire ou bailleur).
- Etablir un droit de préférence au commerçant qui occupe un local lors de sa vente.
Adapter les modalités de l'intervention publique aux besoins des territoires :
- Clarifier et accélérer les procédures de dépôt de dossier pour les porteurs de projets d'aménagements commerciaux.
- Rénover le fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac).
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