Projet de loi de finances : ce qui attend le BTP en 2019

Présenté ce 24 septembre, le projet de loi de finances (PLF) pour 2019 est celui de la « constance ». Le gouvernement promet de continuer ses efforts pour maîtriser les finances publiques, tout en baissant considérablement les impôts. Pas de grandes annonces cette année, donc, mais de vrais points d'inquiétudes pour le BTP, depuis l'assiette du CITE jusqu'à la fin de la niche fiscale sur le gazole.

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Projet de loi de finances : ce qui attend le BTP en 2019
Gérald Darmanin, ministre de l'Action et des Comptes publics (au premier plan) et Bruno Le Maire, ministre de l'Économie et des Finances, ce matin, lors de la présentation du PLF 2019.

« Notre cap, c’est de construire une nouvelle prospérité de la France qui doit bénéficier à tous les Français et tous les territoires. » Le tout sans augmenter la dépense publique, ni la dette, ni les impôts. En introduction à la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2019, ce lundi 24 septembre, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, plante le décor : pas de grandes annonces cette année, ce budget « s’inscrit dans la constance ».

Car le gouvernement n'entend faire aucune concession : « nos résultats économiques sont insatisfaisants par rapport à nos voisins européens. Nous faisons moins bien sur le chômage, sur la croissance – prévision de 1,7% en 2018 et en 2019, NDLR -, sur le déficit public – 2,8% du PIB prévu pour 2019, dont 0,9% de « mesures exceptionnelles » -, sur la dette. Nous ne relâcherons jamais l’effort et continueront avec la même détermination », pour respecter les engagements pris par le président de la République et vis-à-vis de l’Europe. Une maîtrise de la dépense publique qui doit jongler avec la promesse de baisse des impôts conséquente pour l’année 2019 : - 6 Mds€ pour les ménages, -18,8Mds€ pour les entreprises.

Voici le détail des mesures intéressant le BTP et l'immobilier.


Collectivités locales

47,3 Mds€ de transferts aux collectivités.

Le total des transferts aux collectivités locales (dotations, TVA affectée aux régions…) augmentera de 300 M€, pour atteindre 47,3 Mds en 2019. Les pouvoirs publics locaux devront cependant continuer à fournir un effort conséquent, conformément à la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022.

Rappelons que ce texte vise à réduire de 2,6 Mds€ par an le besoin de financement des collectivités, notamment en prévoyant une hausse contenue de leurs dépenses de fonctionnement (+1,2% en moyenne). 229 grandes collectivités sur les 322 qui étaient incitées à le faire ont signé un contrat financier indiquant leurs objectifs. 17 autres ont contractualisé sans y être obligées. L’Etat, quant à lui, devrait « faire 2,5 fois plus d’effort que les collectivités en 2019, ce qui est l’exact inverse de ce qu’il s’est produit » entre 2007 et 2017, assure Gérald Darmanin.

Taxe d’habitation et réforme à venir de la fiscalité locale.

2019 sera la deuxième année de la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des ménages. Mise en place progressivement sur trois ans, elle coûtera à l’Etat 3,8 Mds€ en plus l’an prochain sous forme de dégrèvement (contre 3,2 Mds en 2018). Gérald Darmanin a par ailleurs confirmé qu’à terme, la taxe d’habitation serait supprimée pour l’ensemble des résidences principales (en 2021 au plus tard).

Mais pour cela, il faudra trouver encore 6 Mds€ supplémentaires. « Un projet de loi spécifique » pour refondre la fiscalité locale sera présenté au premier semestre 2019, a assuré le ministre, comme l’avait déjà annoncé son collègue Olivier Dussopt quelques jours auparavant.

Logement

Rénovation énergétique dans le logement.

« Nous avons fait le choix de soutenir la transition énergétique avec la prolongation de l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), du crédit d’impôt transition énergétique (CITE) et avec la prime sur les véhicules propres », a lancé Bruno Le Maire.

L’éco-PTZ bénéficie d’un coup de pouce fiscal, il est « simplifié et renforcé, indique-t-on au ministère de l’Economie et des Finances. Nous le prorogeons de trois ans, jusqu’en 2021, il sera étendu à tous les logements de plus de deux ans (alors que jusqu’à présent, il ne concernait que les travaux réalisés dans les habitations construites avant 1990) et nous supprimons l’obligation de bouquet de travaux ».

Par ailleurs, l’éco-PTZ inclura les travaux d’isolation des planchers bas. Et la durée d’emprunt est uniformisée à « quinze ans, indépendamment du nombre d’actions financées, ce qui permettra aux ménages d’emprunter sur une durée plus longue ».

Le cumul « entre un premier éco-PTZ et un éco-PTZ complémentaire » est possible, « dans un délai porté à cinq ans ». Objectif : faciliter l’étalement des travaux de rénovation énergétique dans le temps.

Enfin, l’éco-PTZ devrait être facilité pour les copropriétés grâce à deux mesures : la suppression du seuil de 75% des quotes-parts afférentes à des lots affectés à l’usage d’habitation, et en autorisant « le cumul entre un premier éco-PTZ attribué à un syndicat de copropriétaires (éco-PTZ copropriété) et un éco-PTZ complémentaire attribué soit à ce même syndicat de copropriétaires soit à un copropriétaire, afin de faciliter le financement des travaux de rénovation énergétique en copropriété et son étalement dans le temps », indique le PLF 2019.

Le rabotage du Crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) est acté.

Si le CITE est bien prorogé d’un an, c’est bien dans sa forme votée dans le cadre du budget 2018, c’est-à-dire, en excluant les ouvrants (portes, fenêtres, volets, etc.), comme le craignaient les organisations professionnelles, qui ont multiplié les contre-propositions, notamment en "fléchant" le CITE sur le remplacement du simple vitrage pour les fenêtres. Sans succès pour le moment.

Ce recentrage confirmé par le gouvernement devrait faire économiser 800 M€. Ensuite, le CITE sera transformé en prime à destination des ménages modestes. Ce décalage dans le temps -alors ministre, Nicolas Hulot évoquait une prime dès juin 2018- s’explique « par la complexité de la transformation de ce crédit d’impôt en prime. Nous avons préféré prendre plus de temps pour réaliser cette modification », explique-t-on dans l’entourage du ministre.


Réforme des APL.

Au printemps 2019, les APL seront calculées « sur la base des revenus de l’année en cours et non plus sur ceux perçus deux ans auparavant comme c’était le cas jusqu’à présent ». Objectif : réaliser 900 M€ d’économies.

Par ailleurs, cette aide au logement pourrait faire partie du socle d’aides publiques qui devraient permettre de créer le Revenu universel d’activité, promis par Emmanuel Macron à la mi-septembre. « Les travaux sont en cours sur la définition de cette allocation unique, les APL font partie des sujets. »



Nouvelle taxe sur l’assurance emprunteur.

Le projet de loi Pacte devrait relever le seuil de contribution à la participation des employeurs à l’effort de construction (Peec) à 50 salariés (contre 20 aujourd’hui). La Peec étant la principale source de revenus d’Action Logement, cela reviendrait à réduire ses ressources d’environ 300M€ par an selon les calculs de l’organisme paritaire.

L’ex-1% Logement a donc négocié une taxe sur l’assurance emprunteur, une mesure inscrite dans le PLF 2019. « Cela ne concernera que le flux et pas le stock (en d’autres termes, les nouveaux contrats signés, NDLR), spécifie-t-on à Bercy, qui table sur une nouvelle ressource de 100 M€ par an. Depuis la loi Sapin 2, les particuliers peuvent faire jouer la concurrence entres les assurances et donc réaliser des économies. De quoi compenser cette nouvelle taxe. »


Environnement

Augmentation des crédits.

La Transition écologique connaîtra « sa plus grande augmentation de crédits depuis la création » d’un ministère dédié à ces questions, soutient le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin. Avec une hausse de 3,1%, le ministère de François de Rugy bénéficie de près d’1 Md € supplémentaires, soit un montant total de crédits de 34,2 Mds € pour le ministère et ses opérateurs.

Hausse du budget de l’Afitf.

Les infrastructures de transports vont notamment profiter de cette augmentation des crédits. Le ministère des Transports dans sa totalité se voit ainsi allouer un budget de 7 Mds € (soit 300M€ en plus). Pour la seule Agence de financement des infrastructures de transports de France (Afitf), l’augmentation est de 150 M€, après 100 M€ l’an passé.

Conformément aux priorités du gouvernement, et en attendant la loi d’orientation des mobilités (LOM), cette hausse devrait être principalement dédiée à l’entretien et à la régénération des réseaux routier national non concédé et fluvial.

Fiscalité écologique.

La hausse de la fiscalité écologique se poursuit. Ce sera notamment le cas de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), dont l’augmentation doit permettre de faire converger les prix du gazole et de l’essence. « Un choix que nous assumons, nous corrigeons une anomalie », a insisté Bruno Le Maire.

La recette passera ainsi d’un peu plus de 13 Mds € en 2018 à 17Mds € l’an prochain. Une augmentation qui s’explique aussi par la fin d’une niche fiscale, celle du tarif réduit de TICPE pour le gazole non routier. Une mesure qui pèsera pour 1 Md € sur les entreprises, et qui touchera principalement le BTP.

Entreprises

CICE.

La bascule du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en allègement de charges se poursuit, et apportera « 20 M€ de trésorerie aux entreprises, défend le ministre de l’Economie. Cette bascule en allègement pérenne leur donne de la visibilité. L’impact positif de cette transformation doit permettre de créer 100 000 emplois en plus en 2020-2021 ».

Les réactions des fédérations professionnelles :

FFB : "Budget 2019 : oui, mais !"

"Le projet de Loi de finances pour 2019 s’avère principalement marqué par une grande stabilité, pour les marchés du bâtiment. Conformément aux annonces du président de la République lors des « 24h du bâtiment » en 2017, le Prêt à taux zéro (PTZ) et le Pinel sont reconduits en l’état. Les menaces qui pesaient sur ces dispositifs semblent donc écartées. Mais la dégradation déjà à l’œuvre sur les marchés du logement ne sera pas compensée.

Conformément aux annonces du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, lors du congrès 2018 de la FFB, confirmées par le Premier ministre en septembre, les taux réduits de TVA sont prorogés sans modification. Cela permettra de soutenir le marché de l’amélioration-entretien des logements, qui peine à se ressaisir malgré la reprise économique à l’œuvre depuis la fin 2015.

Reste une rupture forte, celle du Crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE). Alors que la suppression de l’éligibilité des fenêtres et chaudières performantes au fioul avait été présentée comme une mesure transitoire, dans l’attente d’une étude de l’Ademe et du CSTB permettant de rebattre les cartes en faveur d’une rénovation énergétique plus efficace, le projet de Loi de finances reconduit simplement le « CITE dégradé » en 2019 et prévoit une transformation en prime réservée aux plus modestes en 2020.

Pour Jacques Chanut, président de la FFB, « à force de valse-hésitation sur les aides, le marché de la rénovation énergétique va se trouver profondément affecté, au risque de s’écarter définitivement des promesses de l’accord de Paris. Le ministre de la Transition énergétique et solidaire, François de Rugy, a toutefois ouvert une fenêtre de négociation sur l’avenir du CITE. La FFB compte bien se saisir de cette opportunité pour parvenir à un dispositif plus équilibré et plus pertinent »."

André Laignel, président du Comité des finances locales : "un budget en trompe-l’œil"

"Selon le gouvernement, les dotations seraient stables et la péréquation à l'ordre du jour. L'opinion des membres du CFL converge cependant : ce budget, en ce qui concerne les collectivités territoriales et les territoires, est en trompe-l’œil. Le présenter comme stable est optiquement réel, mais il est réellement dans la lignée des précédents, c'est-à-dire dans la restriction."

"Le gel des dotations ne signifie pas leur stabilité, car il ne prend pas en compte l'inflation. L'hypothèse raisonnable serait qu'elle atteigne 1,7% cette année. Mais si on analyse l'évolution des coûts pour les collectivités locales, elle est souvent 1% supérieure à l'indice Insee car nous sommes plus impactés par l'évolution des matières premières, et notamment de l'énergie."

"Le gouvernement se vante de faire plus de péréquation alors qu'il ne met pas un centime de plus. Les 190M€ supplémentaires pour la péréquation sont en réalité prélevés sur la DGF forfaitaire, comme les 30M€ dédiés à la dotation d'intercommunalité. Comme d'habitude, l'exécutif présente ces mesures comme un cadeau, alors qu'elles sont payées par les collectivités elles-mêmes, pas par l'Etat."

"Alors que le gouvernement assure que l'effort sera porté sur l'investissement, alors que la dotation de soutien à l'investissement local baisse pour la deuxième année consécutive. Elle s'élevait à 818M€ en 2017, 665M€ en 2018, et passera à 570M€ l'an prochain."

"Derrière l'autosatisfaction affichée, la réalité est beaucoup plus complexe."

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