Prisons à vendre et à rénover

L'Etat met en vente plusieurs anciennes prisons de centre-ville souvent classées. Si certaines entament une nouvelle vie et se muent en logements sociaux ou salles de concert, d'autres sont laissées à l'abandon faute d'acquéreurs rebutés par la coûteuse rénovation à prévoir.

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Prisons à vendre et à rénover
"Petite annonce" publiée sur le site des cessions immobilières de l'Etat

"Prison de 1277.42 m2, fin XIXème, dans le centre de Grasse, vendue sans garage, ni parking. Travaux à prévoir": l'annonce est consultable sur le site internet du ministère des Finances parmi une dizaine d'autres établissements pénitentiaires.

Ces anciennes prisons de centre-ville souvent classées, à la rénovation coûteuse, sont cédées par l'Etat. Si certaines entament une nouvelle vie et se muent en logements sociaux ou salles de concert, d'autres sont laissées à l'abandon faute d'acquéreurs.

"Globalement, ça coûte moins cher de construire une nouvelle prison. Ce sont des structures enclavées qui se veulent indestructibles, c'est donc difficile de les réaménager", explique Laurent Vilbert, chargé de l'aménagement du territoire à la mairie de Nantes. "Construire en périphérie ne nécessite pas de bloquer la circulation du centre-ville", ajoute-t-il.

L'ancienne maison d'arrêt de la ville, "inadaptée" aux normes européennes de détention, a été rachetée pour 4,9 millions d'euros par l'agglomération. Transformée, elle abritera logements sociaux, crèche et parking souterrain à l'horizon 2018. "Un droit de priorité existe pour la collectivité sur laquelle le bien est situé. Dans ce cas, il y a une vente de gré à gré", précise le ministère des Finances.

Cellules tapissées de livres

C'est le cas à Coulommiers (Seine-et-Marne) où la municipalité a racheté pour 2,34 millions d'euros son ancienne prison bâtie en 1851 en pierre meulière pour la transformer en bibliothèque. Les cellules sont désormais tapissées de livres que baigne la lumière par de grandes baies vitrées.

A Guingamp (Côtes-d'Armor), la prison qui est un des rares exemples d'architecture "pennsylvanienne" avec des cellules individuelles autour d'une cour, est la propriété de la commune depuis 1992. Elle va accueillir un centre d’art visuel. La cour principale doit être réaménagée en salle de spectacle, avec une capacité de 160 places assises. Le montant de la restauration qui a débuté en septembre pour deux ans s'élève à 8 millions d'euros.

Si certaines villes peuvent se permettre de racheter leurs anciennes prisons, d'autres n'en n'ont pas les moyens.

La maison d'arrêt de Fontainebleau (Seine-et-Marne) a été cédée à un acheteur privé qui n'a pas souhaité divulguer son identité lors d'une mise aux enchères en juin pour 480.000 euros. Il a annoncé que la prison qui a servi jusqu'en 1990 puis a été musée national des prisons jusqu'en 2010, sera dédiée aux logements. "On s'interroge beaucoup sur le promoteur. Tout une partie du bâtiment est classée", s'est inquiété Pierre Tsiakkaros, directeur de cabinet du maire.

La ville n'a pas utilisé son droit de préemption. "On a déjà un plan d’investissement budgété, on ne peut pas racheter tous les bâtiments de Fontainebleau!"

Mais la législation est stricte lorsque le bien cédé est classé ou inscrit, tempère France Domaine qui gère les cessions immobilières. Ainsi, l'acquéreur s'engage à respecter les prescriptions du code du patrimoine.

Lyon s'est assuré de la pérennité de ses deux anciennes prisons.

Saint-Paul et Saint-Joseph, construites au XIXe siècle par les architectes Louis-Pierre Baltard et Antonin Louvier, ont été reconverties en 2015, l'une en un campus de 35.000 m2, l'autre pour abriter logements intergénérationnels, commerces et bureaux.

L'Université catholique de Lyon, qui a déboursé environ 82 millions d'euros - financés par l'emprunt, la vente de ses anciens locaux, le mécénat et les collectivités territoriales-, a préservé de larges pans de l'ancien bâtiment pénitentiaire de Saint-Joseph, comme la rotonde d'où les gardiens surveillaient les détenus. Elle est désormais enchâssée dans un bâtiment moderne où prédomine une immense verrière.

Les quelque 400 détenus de ces deux établissements avaient été transférés en mai 2009 au nouveau centre pénitentiaire de Corbas, en banlieue lyonnaise.

La France s'est lancée depuis une quinzaine d'années dans un vaste plan de modernisation de son parc pénitencier. Elle avait été tancée par l'Europe pour sa surpopulation carcérale (68.819 détenus pour 58.507 places, en août) et la vétusté de ses prisons. La Cour européenne des droits de l'Homme l'avait épinglée en 2013 pour "traitement dégradant" dans sa maison d'arrêt de Nancy, finalement fermée en 2009. Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas a proposé mardi un plan à long terme de construction de nouvelles cellules.

Prison transformée en boîte de nuit

A la prison de Grasse (Alpes-Maritimes), "les conditions d'accueil des détenus et de travail des surveillants n'étaient plus optimales, ce qui a conduit l'administration pénitentiaire à se séparer de ce bien", explique Bercy qui indique qu'il faudra déposer une caution de 50.000 euros pour participer à l'appel d'offres. Il est aussi précisé des "travaux à prévoir", ce qui peut effrayer plus d'un acheteur.

C'est le cas pour la prison de Sainte-Anne à Avignon, bâtiment de 11.000 m2 au pied du palais des Papes, estimé à 2,5 millions d'euros, qui cherche repreneur depuis 2005. Un hôtel de luxe financé par Marriott avait été envisagé. Le groupe hôtelier a jeté l'éponge devant l’ampleur des travaux.

Selon Bercy, des biens trop compliqués à restructurer, des problèmes de pollution mais aussi l'absence de marché ou un contexte défavorable de l'immobilier sont autant de raisons qui font que certains biens ne trouvent pas preneurs.

Aujourd'hui, la mairie d'Avignon, propriétaire de la maison d'arrêt, a lancé un appel à projet avec pour objectif de créer une friche artistique, des logements et des commerces de proximités.

A Rennes, la prison Jacques Cartier, hors d'usage depuis 2011, est en attente d'un nouveau propriétaire. Elle a servi de tournage au film "La Taularde" produit par Julie Gayet avec Sophie Marceau en tête d'affiche.

A deux kilomètres de la prison, celle de Saint-Michel, qui date du Moyen-Âge, a entamé une nouvelle vie et abrite une boîte de nuit prisée des étudiants...

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