Priorité à la réhabilitation du parc

-Pour la plupart des stations de sports d'hiver, l'ère des grandes constructions semble révolue. -Les priorités, désormais, portent sur la rénovation du parc immobilier existant et sur l'aménagement de nouveaux espaces pour les surfeurs et amateurs de « nouvelles glisses », afin de développer le tourisme.

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Un potentiel d'amateurs de loisirs en montagne qui n'est pas illimité, la montée du tourisme d'hiver au soleil, une baisse du pouvoir d'achat due à la crise économique, tout cela a constitué un frein à l'expansion des stations et, ce faisant, à la construction en montagne dont les effets se sont fait sentir à la fin des années 80.

Cela ne signifie pas que l'activité des loisirs de montagne soit en perte de vitesse. La clientèle est fidèle. Les chiffres de réservation enregistrés dès le début de la saison 1996-1997 en témoignent. Et le nombre de logements pour accueillir les vacanciers est suffisant. Reste maintenant à savoir s'ils sont bien adaptés à la clientèle. Une question essentielle que se posent de nombreux responsables depuis plusieurs années.

Des logements à remettre au goût du jour

La fin des années 80 a été marquée par des périodes de pénurie de neige qui ont forcé les acteurs du tourisme à s'interroger sur leurs pratiques, sur leurs produits. Et, parmi ceux-ci, le logement. Le constat est très vite apparu d'une inadéquation croissante entre l'offre locative et la demande. D'abord sur la qualité de confort, ce qui est logique pour des immeubles construits il y a vingt ou trente ans avec des techniques de l'époque. Sur la conception des logements ensuite : la clientèle d'aujourd'hui n'est pas seulement composée de passionnés de la glisse, mais compte aussi des « contemplatifs » de la montagne. Elle ne se contente plus d'un espace exigu pour profiter des vacances d'hiver.

Le Service d'études et d'aménagement touristique de la montagne (SEATM) rapportait déjà, en mai 1992, que la structure du parc de logements neufs vendus dans les Alpes du Nord en 1987 comportait presque trois quarts de F1, alors qu'il n'en restait plus qu'un quart en 1991 au profit des F2 et F3, beaucoup plus demandés. Autant d'éléments qui ont conduit à étudier la nécessaire réhabilitation de l'immobilier touristique dont l'enjeu n'est pas négligeable pour des entreprises mises à mal par l'arrêt de la construction neuve.

Le problème de la rénovation se pose cependant avec plus ou moins d'acuité en fonction des structures immobilières qui varient selon les régions. Dans les stations-villages aménagées sur la base d'un habitat ancien et quasi individuel (chalets ou petits immeubles), comme c'est souvent le cas en Haute-Savoie, dans le Jura, les Vosges, le Massif central ou en moyenne montagne, les propriétaires se sont davantage préoccupés d'une mise aux normes permanente de leurs bâtiments, au fur et à mesure de travaux d'entretien réguliers. Situation identique pour l'immobilier, même collectif, dépendant d'intervenants professionnels comme Pierre et Vacances, ou du tourisme social (VVF, Renouveau...) : ils ont été attentifs non seulement à maintenir en état leurs structures immobilières, mais aussi à les adapter selon les évolutions de leurs clientèles.

Reste la part la plus importante de l'immobilier touristique : celle des immeubles collectifs, de grands ensembles pour certains. On les trouve essentiellement dans les grandes stations, et ils présentent des degrés divers de déqualification allant d'une conception dépassée à une dégradation frisant l'insalubrité, en passant par un entretien minimal des parties communes ou une usure accélérée par une occupation intensive.

Motiver les propriétaires à entreprendre des travaux

L'enjeu de la réhabilitation se situe essentiellement dans ce type de bâtiment, et il n'est pas mince puisque, selon une estimation un peu empirique, cela représente globalement un marché potentiel de 5 milliards de francs de travaux.

Le frein essentiel à une réhabilitation réside aujourd'hui dans le système de copropriété qui prévaut dans ces immeubles. Une copropriété très morcelée et qui s'est modifiée. La génération des premiers acheteurs a, notamment par le jeu des successions, cédé le pas à des propriétaires moins intéressés par le devenir de leurs biens et plus attirés par des investissements en dehors de la pierre. Les syndics, qui avaient tendance à se confiner dans un rôle de pure gestion de l'occupation des locaux ont, eux aussi, dû modifier leurs comportements et prendre en compte l'entretien du patrimoine privé qui ne peut se dissocier des parties communes. A cet égard, la profession semble avoir bien réagi en s'inscrivant dans les différentes démarches engagées pour vaincre l'inertie des propriétaires, premier frein à toute opération de réhabilitation.

Mobilisation générale de l'ensemble des acteurs

La prise de conscience du problème n'est pas nouvelle, et il est intéressant de constater qu'en 1992, à la suite de différentes études engagées par le SEATM et par les élus de montagne, le ministre du Tourisme de l'époque, Jean-Michel Baylet, avait « mis en tête de ses objectifs la maîtrise de l'immobilier en montagne » pour proposer des produits viables économiquement. Par ailleurs, la rénovation et la valorisation du bâti existant figuraient dans les priorités de la Convention alpine internationale. Cette prise en compte par l'Etat du problème est intéressante mais, en attendant que cela soit suivi d'effet, le département de Savoie, davantage concerné, a initié la mise en place d'un observatoire de l'immobilier en montagne, formule adoptée très rapidement par l'lsère et la Haute-Savoie.

Autre phénomène remarquable : la mobilisation des différents intervenants professionnels et institutionnels. En décembre 1993 s'est ainsi créée en Savoie l'Association pour la rénovation des bâtiments et la réhabilitation de leur environnement (Arbre) réunissant les architectes de Savoie, les bureaux de contrôle et soixante entreprises du bâtiment, avec comme membres d'honneur le conseil général de Savoie, le syndicat BTP 73, le centre d'étude du BTP et EDF.

« L'approche du BTP 73, explique le président de l'Arbre, Jacques Chassany, repose sur le principe d'un diagnostic préalable des travaux à engager » pour répondre aux demandes des gestionnaires de copropriétés.

La convention élaborée entre l'Arbre, la FNAIM (Fédération nationale de l'immobilier) et la Cnab (Confédération nationale des administrateurs de biens) s'inscrit dans cette démarche, et elle a permis d'initier une première expérience de définition et de chiffrage de travaux à effectuer pour la rénovation d'un immeuble aux Menuires.

Pour parvenir à décider les propriétaires à investir, les syndics doivent en effet disposer d'arguments concrets. Ils doivent même aller plus loin en leur proposant des formules de retour d'investissements par la gestion des locations.

Mais l'efficacité ne peut être au rendez-vous que si d'autres partenaires interviennent. L'exemple de la rénovation d'un ensemble de 580 appartements à Aime 2000 (La Plagne) est éloquent. Malgré la présence d'un gestionnaire unique, l'agence Maeva, il a fallu l'engagement de la Société d'aménagement de La Plagne (SAP), concessionnaire des remontées mécaniques. Elle a financé 50 % de la réhabilitation par appartement en échange d'un bail de neuf ans pour remettre cet ensemble dans le circuit locatif bénéfique à l'activité économique de la station. Tout cela pour éviter le phénomène des résidences aux « volets clos », des studios retirés du marché parce que non adaptés à la demande,

A Tignes, en revanche, il a fallu prendre un arrêté de péril pour conforter un ensemble de 2 000 logements et d'une galerie marchande, en attendant que la justice se prononce sur les responsabilités des uns et des autres quant aux parties communes.

Une nouvelle génération de chantiers en montagne

La réhabilitation de l'immobilier de montagne ne peut se déconnecter d'une réflexion d'ensemble sur le devenir des stations. « N'est-ce pas le chantier de la cinquième génération des stations ? » interrogeait en 1992 le SEATM. Patrick Dieny, directeur général de l'environnement et de l'aménagement au conseil général de Savoie, insiste en disant qu'on est « aujourd'hui à une période charnière de l'offre en montagne, dont il faut renforcer globalement la qualité, et notamment celle de l'offre immobilière ». On répond ainsi au souci manifesté par le président de l'Arbre, Jacques Chassany, de voir les pouvoirs publics s'engager dans ce processus de modernisation. La loi « montagne » donne maintenant des outils aux communes pour privilégier un aménagement plus cohérent et soucieux de l'environnement qu'auparavant.

Revoir les aides à la pierre pour l'immobilier touristique

Pour autant, il faut que ces communes les utilisent et donnent l'exemple, dans la mesure où l'on estime que tous les acteurs de la vie d'une station sont concernés par son devenir, et donc par le souci de la rénovation de ses équipements publics et privés. S'exprime ainsi le principe qui a guidé le conseil général de la Savoie dans l'initiative qu'il a prise en janvier 1996 d'engager une expérience originale d'aide à la réhabilitation de l'immobilier (voir encadré).

L'idée maîtresse est d'intervenir sur les espaces publics pour inciter les propriétaires privés à faire de même et à bénéficier de la plus-value ainsi apportée. Cet effet d'entraînement a d'ailleurs pu être vérifié lors des restructurations urbanistiques entreprises du centre de Val-d'Isère, de La Clusaz ou de Saint-Lary.

Le président de l'Arbre est satisfait de cette façon de voir qui engage aussi tous les intervenants immobiliers en montagne, mais, pour lui donner plus d'avenir, il estime que « les pouvoirs publics pourraient être encore plus novateurs en la matière, en reconsidérant les aides au financement de l'immobilier touristique ». Dans une période où les aides au logement principal ne répondent pas aux besoins, une telle demande d'intervention sur des résidences secondaires peut paraître audacieuse. Quand il s'agit de résidences destinées à la mise en location pour l'accueil des vacanciers, ce n'est plus le cas, ainsi que le souligne Jacques Chassany : « De telles interventions ne peuvent que favoriser le développement de l'activité touristique dont on oublie trop qu'il s'agit d'une véritable industrie qui participe, pour beaucoup, à l'équilibre de la balance commerciale de la France.

Dans plusieurs régions touristiques, les professionnels semblent prêts à mettre en place des associations comme l'Arbre. Ce mouvement pourra peut-être permettre de se faire entendre auprès du ministère des Finances pour trouver des solutions adaptées aux besoins de la réhabilitation de l'immobilier touristique, dans la mesure où celui-ci participe à l'activité d'une station. »

Un enjeu qui apparaît effectivement essentiel pour le devenir, non seulement du tourisme en montagne, mais également des installations de littoral qui sont confrontées aux mêmes problèmes de réhabilitation d'un parc touristique immobilier qu'il faut remettre au goût du jour dans tous les sens du terme.

Photos :

Station d'Avoriaz : quatre chalets seront construits sur la falaise.

Appartement rénové à Aime 2000, à La Plagne. Il a fallu l'engagement du concessionnaire des remontées mécaniques pour mener à bien la réhabilitation.

Plan :

Dix millions de francs seront consacrés au projet de remodelage de la station de Courchevel afin d'améliorer la sécurité des skieurs.

«L'enjeu de la réhabilitation en montagne : un marché potentiel de quelque 5 milliards de francs. »

«L'idée maîtresse est d'intervenir sur les espaces publics pour inciter les propriétaires privés à faire de même et à bénéficier de la plus-value ainsi apportée. »

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