
«Pourquoi je vais retourner travailler», Yoann Choin-Joubert, P-DG de Réalités
le 25/03/2020 | Loire-Atlantique, Coronavirus, Immobilier
Faut-il reprendre le travail ou non dans ce contexte de crise sanitaire ? Le Moniteur ouvre le débat avec Yoann Choin-Joubert, P-DG-fondateur du groupe de promotion immobilière Réalités qui a tranché. « Je vais retourner travailler » explique-t-il dans une tribune où il pointe le risque d’une guerre économique.
«Nous sommes en guerre.
Le combat est engagé pour gagner cette guerre contre le virus ; mais aussi pour gagner cette guerre économique dans laquelle nous sommes tous engagés de sorte que nos sociétés ne tombent pas dans le chaos pour les dix prochaines années.
Cette guerre économique va se dérouler dans un contexte tendu où les populistes tenaient déjà la dragée haute aux humanistes. La tentation du nationalisme était déjà très forte avant la crise et elle l’est malheureusement encore plus aujourd’hui. Cette tentation associée à une crise économique profonde de longue haleine conduirait sans doute à un péril guerrier mondial.
Il faut donc écouter le gouvernement quand il tente de nous expliquer la marche à suivre. Cette marche à suivre est un chemin de crête délicat entre le confinement le plus strict et la reprise d’activité la plus forte.
Il faut confiner, non pas pour éviter de tomber malade. Il faut se confiner pour éviter de tous tomber malades en même temps afin de laisser au système la possibilité de gérer la pandémie et d’inventer les remèdes.
Dans le même temps, nous devons également relancer l’activité car le confinement économique du pays est insoutenable plus de quelques jours. Nous parlons peut-être d’un enjeu proche de 1 000 milliards d’euros dont le pays ne saura pas assumer la charge. Il ne faut donc pas que le confinement crée plus de drames qu’il ne résoudra de problèmes.
Ainsi, dans un premier temps et une première compréhension, nous avions choisi d’arrêter nos chantiers dès le lundi 16 mars. Nous comprenons ce jour qu’on attend de nous l’exact inverse. Nous allons faire nos meilleurs efforts pour mettre en œuvre ce que la Nation attend de nous. L’Etat nous demande de reprendre le travail tout en respectant méticuleusement les règles de sécurités sanitaires, nous le ferons. C’est notre devoir.
Et là, débute de nouveau la question du « chacun pour soi » et du fameux « droit de retrait » où l’individualité prime totalement sur l’intérêt collectif et sur le sens du devoir. Il suffit de regarder 100 ans en arrière pour voir que nos grands-parents étaient forgés d’un autre bois. Il suffit de se demander combien l’automobile a tué de gens chaque année alors que nous continuons de conduire tous les jours. Il suffit même de regarder le nombre d’accidents de vélos quotidiens pour s’en convaincre. Il suffit de compter les morts dus à la cigarette pour rire en écoutant un fumeur s’inscrire dans le principe égoïste du droit de retrait.
Je crois qu’il est sérieusement temps de reprendre son courage à deux mains pour sauver nos économies, notre société et l’avenir de nos enfants.
On nous demande une chose compliquée : faire nos meilleurs efforts pour travailler en sécurité tout en respectant scrupuleusement le confinement à titre personnel.
Devons-nous rester cloîtrés derrière notre porte palière attendant gentiment que les soignants se battent seuls alors que notre économie s’effondrerait d’une part ; et allons-nous rester à la maison, inconscients de notre participation directe ou indirecte aux services essentiels à la nation (santé, police, alimentation, etc.) ?
Non, je vous le dis, en vérité, cela ne sera pas mon cas. Je vais convaincre mon entreprise de retourner au travail le plus en sécurité possible et j’espère que nous réussirons à engager autour de nous d’autres entreprises. Nous nous donnerons les moyens d’être en sécurité sanitaire mais soyons simplement des citoyens responsables !
Le dialogue social doit mobiliser les équipes et permettre de trouver les meilleures dispositions possibles de protection sanitaire des collaborateurs ; mais il doit permettre le retour en activité des entreprises.
Il doit être extrêmement clair pour tout le monde que la poursuite d’une activité dégradée ne produira aucun bénéfice pour l’entreprise, mais elle permettra de garder la nation en mouvement et elle protégera les finances publiques ; ce faisant elle préserve l’avenir de nos concitoyens en préservant la capacité d’investissement de la nation.
Comme le confinement, l’effort de sauvegarde de notre modèle social va passer par l’effort collectif de tous au service de tous dans « l’oubli de sa petite personne ». Si nous sommes devenus égoïstes au point de ne plus savoir faire ce petit effort, nous ne sommes dignes de rien. Ainsi, protégeons-nous, travaillons pour être solidaire.»
CHRIPOU
25/03/2020 17h:38
Bonjour,Je salue cette réflexion contre-intuitive pour le temps court de la crise actuelle mais qui se révèle être très inspirée pour le moyen et le long terme. Survivre sur un champ de ruines économique ne sera que peu d'intérêt, mais concilier l'enjeu du temps court en protégeant ceux qui travaillent avec les bons équipements avec les enjeux des temps à venir en protégeant l'outil de production dès à présent, voilà un engagement de haute vision. J'adhère totalement à ce point de vue et ne peut que saluer la perspicacité et l'évolution réfléchie de ce chef d’entreprise responsable. Voilà le chemin tracé... pour que l'avenir soit celui de la victoire des sages.