Paysage et transition : le RAP mène la danse de la présidentielle

Le Réseau des acteurs du paysage (RAP) est né le 1er mars. Les sept organisations signataires de « l’appel au bon gouvernement » se retrouvent autour d‘un message qu’elles veulent porter jusqu’au sommet de l’Etat : la transition écologique passe par l’approche paysagère.

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Paysage et transition : le RAP mène la danse de la présidentielle
Les paysagistes conseil de l'Etat ont démontré le rôle central du paysage dans la transition écologique, en septembre dernier au cours de leur séminaire technique de Biscarosse.

« Tissons ce soir le réseau des réseaux » ! Par cette invitation lancée le 1er mars, Henri Bava, président de la Fédération française du paysage (FFP), a résumé l’état d’esprit des sept organisations signataires de « l’appel au bon gouvernement » : soudées par une adhésion commune à la démarche paysagère, toutes se concentrent désormais sur l’étape suivante, celle d’un combat de longue haleine.

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Elles disposent d’un cri de ralliement qui sonne comme un appel à rentrer dans la danse politique nationale: RAP, comme Réseau des acteurs du paysage.

Outre les paysagistes concepteurs représentés par la FFP et l’Association des paysagistes de l’Etat (APCE), le nouvel étendard rassemble la fédération nationale des conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (FNCAUE), la fédération nationale des agences d’urbanisme (Fnau), la fédération nationale des parcs naturels régionaux (FNPNR), le réseau des Grands sites de France (GSF) et le collectif des paysages de l’après-pétrole (PAP).

Faire nombre

« Il va falloir faire nombre », ajoute Henri Bava, lucide sur la faiblesse des troupes composées par les 3 800 paysagistes concepteurs, comparés aux 30 000 architectes, et quand bien même la France tiendrait l’objectif qu’il formule pour les 10 ans à venir : doubler cette force de frappe, pour dépasser les 8 000. La solution dépasse l’horizon des titres professionnels : « Le RAP a vocation à embarquer toutes les parties prenantes », espère Henri Bava.

« Le paysage, c’est la mise en relation », rebondit le président de l’APCE. « Cette fonction fédératrice s’adresse à l’aménageur comme à l’agriculteur ou à l’ingénieur des routes », précise Bertrand Folléa, fort de la démonstration administrée en septembre dernier lors du séminaire technique annuel de l’APCE sur le thème de la transition.

Décupler l’effort

De ces trois jours est issue l’une des propositions clés reprise dans l’appel présenté le 1er mars par les sept organisations signataires : « Le 10 % paysage ». Clin d’œil au dispositif qui, dans les années 1990, avait réservé 1 % des budgets autoroutiers à des projets partenariaux entre l’Etat et les territoires desservis, le mot d’ordre exprime la nécessité d’un décuplement de l’effort dicté par l’urgence des transitions : « 30 ans après la loi Paysage, il est temps de se réinventer », conclut Bertrand Folléa. De la mobilité à l’activité économique, le 10 % s’appliquerait à tout projet impactant le cadre de vie quotidien de ses riverains, dans une démarche associant tous les usagers des territoires.

Dans les champs défigurés par la monoculture intensive comme dans les villes surchauffées par l’imperméabilisation, le nouveau réseau réinterprète l’œuvre d’Ambrogio Lorenzetti, qui avait représenté l’harmonie entre ville et campagne dans sa fresque du bon gouvernement, dans la Toscane du XIVe siècle : « Le paysage nous aide à sortir du langage des technocrates, pour retrouver l’univers du sensible, non pas celui de la sensiblerie avec larmes à l’œil, mais celui des sens qui se réveillent », abonde Joël Baud-Grasset, agriculteur savoyard et président de la FNCAUE, heureux de rappeler les liens de parenté entre les mots pays, paysan et paysage.

Sortir du langage techno

Côté villes, la directrice générale de la fédération nationale des agences d’urbanisme renchérit : « Le paysage parle à tout un chacun », constate Brigitte Bariol. Enjoints de concilier sobriété foncière et protection de la biodiversité, les fabricants de la ville mesurent la valeur de la médiation participative, inséparable de la démarche paysagère promue dans l’appel.

Pour nourrir son inspiration, le RAP bénéficie des retours d’expériences de deux de ses membres, animateurs de territoires souvent définis comme des laboratoires de durabilité et de désirabilité : les 58 parcs naturels régionaux et les 50 grands sites de France. Grâce à des engagements négociés entre tous les usagers des territoires, ils prouvent leur capacité à répondre aux défis du ménagement des territoires – un des refrains fédérateurs du RAP.

La preuve par l’expérience

« Les parcs régionaux artificialisent deux fois moins que le reste du pays », rappelle Nicolas Sanaa, chargé de l’urbanisme à la FNPNR, sur la foi d’une étude de référence de 2016. « Les grands sites de France accueillent 3,8 millions de visiteurs par an, tout en préservant leur identité et leur culture, grâce aux solutions concrètes apportées par l’approche paysagère », salue Louis Villaret, président du réseau qui regroupe 500 communes et 1,2 million d’habitants.

L’espoir repose aussi sur les générations montantes de paysagistes concepteurs, dont la directrice de l’Ecole nationale supérieure du paysage se fait la porte-parole : « Nous avons réussi à conscientiser les jeunes, mais nous les avons souvent rendus anxieux. Pour leur redonner foi dans l’avenir et stimuler leur envie du monde de demain, le paysage apporte une voix discordante et positive », s’enthousiasme Alexandra Bonnet, portée par « les belles personnes » qu’elle voit s’engager dans la profession.

Du PAP au RAP

Pour rendre compte de cet élan, la philosophe et présidente du collectif des Paysages de l’après-pétrole (PAP), initiatrice de l’appel, situe la naissance du RAP dans une perspective historique : « Après l’éducation pour tous, la sécurité sociale ou le vote des femmes, le PAP est né de l’intuition d’une nouvelle étape du projet humain planétaire. Certes, le niveau d’alerte appelle à la vigilance. Mais le paysage apporte un fil de confiance à nos sociétés construites sur des valeurs ».

Si cette feuille de route déborde largement du cadre de l’élection présidentielle, le RAP n’en reste pas moins attentif aux manettes à actionner à court terme dans la machine étatique : après l’enquête menée à l’automne dernier auprès de 1 400 maires avec l’appui de l’association des maires de France et du Centre d’études et d’expertise sur les risque, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) tient à la disposition du futur exécutif les ingrédients d’un plan national d’action qui le placerait sur la voie du bon gouvernement.

Co-initiateur de cette démarche au CGEDD, Jean-Pierre Thibault n’attend pas de miracle : « L’Etat ne réagira que s’il sent une pression des territoires », prévient l’inspecteur général.

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