Loi Montagne : les conséquences de l'annulation du décret "UTN" expliquées
Le Conseil d'État a annulé, l'été dernier, le décret du 10 mai 2017 sur les unités touristiques nouvelles (UTN). Motif : il ne soumettait pas à une évaluation environnementale les UTN créées dans les communes non couvertes par un Scot ou par un PLU. Le ministère de la Cohésion des territoires revient sur les conséquences de cette annulation.
Isabelle d'Aloia
Créée pour déroger au principe de continuité des constructions, l'unité touristique nouvelle (UTN) en zone de montagne est un outil stratégique pour ces territoires qui permet la réalisation des aménagements les plus significatifs (construction d’hébergements touristiques, de remontées mécaniques, etc.). Le décret du 10 mai 2017, pris en application de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 dite loi Montagne II, visait à rénover l'ensemble de la procédure des UTN en actant une nouvelle répartition.
Ainsi les UTN « structurantes » relèvent toujours du schéma de cohérence territoriale (Scot) et les UTN « locales » doivent désormais être précisées par les plans locaux d’urbanisme (PLU). Une évaluation environnementale est obligatoire pour l’élaboration de ces deux documents. Mais lorsque la commune concernée n’est pas couverte par de tels documents d’urbanisme, ces opérations d'aménagement sont décidées par l’autorité administrative et ne sont pas soumises à évaluation environnementale. C'est sur ce point que le Conseil d’État, saisi d'un recours en annulation du décret de 2017, l'a censuré par une décision du 26 juin 2019, car la création ou l’extension d’UTN par décision préfectorale est «susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement» au sens de la directive européenne du 27 juin 2001.
Dans une question orale au gouvernement, un sénateur, Cyril Pellevat (Haute-Savoie - LR) s'inquiète de cette décision. "L'annulation partielle du décret pour défaut d'évaluation environnementale [devrait avoir] pour conséquence la publication d'un nouveau décret avec une étude environnementale. Cette évaluation en amont sera moins significative et ne dispensera pas d'une seconde évaluation environnementale qui existe déjà au moment du permis de construire. Le risque est donc de multiplier les étapes et de retarder certains projets". Le sénateur souhaiterait connaître les conséquences juridiques pour les projets concernés par l'annulation de ce décret et les intentions du gouvernement pour alléger le dispositif, ce qui était l'objectif initial du texte annulé. L'exécutif apporte des précisions.
Les UTN restent opérationnelles
"C'est le silence du décret sur ce sujet de l'évaluation environnementale qui est annulé. Pour autant, le contenu de ce décret, notamment pour ce qui concerne le régime des UTN, est validé et reste totalement opérationnel", indique le ministère de la Cohésion des territoires. Il précise que "le Conseil d'État a ainsi considéré que ces UTN résiduelles sont des plans-programmes au sens du droit communautaire et que le décret aurait donc dû les soumettre à une évaluation environnementale".
Cette décision "implique qu'il faut compléter les textes en vigueur pour soumettre expressément les autorisations UTN résiduelles à évaluation environnementale". En outre "les autorisations UTN à venir doivent être soumises à évaluation environnementale – tant que les textes n'ont pas été modifiés, la jurisprudence du Conseil d'État s'applique directement". Par ailleurs, "le Conseil d'État ayant retenu la méconnaissance du droit européen en la matière, l'annulation qu'il a prononcée est rétroactive, ce qui met en exergue l'illégalité des autorisations UTN résiduelles adoptées sans évaluation environnementale".
Peu de risque d'illégalité
Mais le ministère se veut rassurant, précisant que "l'exception d'illégalité résultant de l'absence d'évaluation environnementale de l'autorisation préfectorale portant création d'une UTN devenue définitive, quelle que soit sa nature juridique, ne devrait pas pouvoir être invoquée à l'occasion de la contestation d'une autorisation d'urbanisme". Ainsi la décision du Conseil d'État "n'implique donc pas de rejeter d'office les demandes d'autorisation d'urbanisme si une autorisation préfectorale portant création d'une UTN devenue définitive est irrégulière pour ce motif".
Pour conclure, il rappelle que "les conséquences de cette décision de justice, ainsi que les moyens de sécuriser les autorisations à venir, ont bien été explicitées", aux services locaux de l'État, aux élus locaux ou aux professionnels.
QE n°0887S, réponse à Cyril Pellevat (Haute-Savoie - LR) - JO Sénat du 4 décembre 2019
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