Le nouveau Code de la construction et de l'habitation

Présentée au Conseil des ministres le 29 janvier 2020, l'ordonnance de réécriture des règles de construction recondifiant la première partie du Code de la construction et de l'habitation a été publiée le 31 janvier 2020. Elle s'appliquera à compter du 1er juillet 2021. Petit tour d'horizon des principales mesures et questions encore en suspens.

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La loi pour un État au service d'une société de confiance (Essoc) du 10 août 2018 habilitait dans son article 49 le gouvernement à prendre toute mesure visant à « faciliter la réalisation des projets de construction et à favoriser l'innovation ». Cet objectif est réalisé en deux étapes. L'ordonnance du 30 octobre 2018, dite Essoc 1, facilite la mise en œuvre de solutions alternatives au droit commun dans les projets de construction avec l'entrée en vigueur du permis de faire puis d'expérimenter. Fin janvier 2020 le second texte attendu a été publié. L'ordonnance du 29 janvier 2020 dite Essoc 2 a pour objectif de réécrire et de recodifier le Code de la construction et de l'habitation.

Le Code de la construction et de l'habitation a-t-il été simplifié ?

Depuis des mois, le gouvernement répète à l'envi que l'ordonnance dite Essoc 2 va simplifier et clarifier la partie législative du livre premier du Code de la construction et de l'habitation (CCH). Le volume des règles est réduit d'un quart. Le livre premier est désormais divisé en quatre parties : principes généraux (titres I et II), règles de construction (titre III à VII), règles de contrôle et de sanction (titre VIII) et règle propre à l'Outre-mer (titre IX). L'ordonnance centralise dans le CCH les règles présentes dans les autres codes relatives à la construction, ainsi les articles du Code du travail relatifs à la sécurité sur les chantiers qui sont rapatriés dans le nouveau CCH à droit constant.

La nouvelle écriture change-t-elle la façon de concevoir les règles de construction ?

L'ordonnance identifie des objectifs généraux et renvoie au pouvoir réglementaire la définition des résultats minimaux à atteindre. Il y a, ainsi, un changement de paradigme. L'objectif du nouveau code est de substituer, à l'obligation de moyen imposant aux constructeurs des dispositifs techniques précis et le respect des règles d'art, une obligation de résultat exprimée en performances à atteindre. Le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance indique que : « ce changement a pour objet de redonner une lisibilité et une cohérence aux règles de construction, ainsi que de réduire les coûts de la construction en favorisant l'innovation et la qualité des bâtiments ». Ainsi le nouvel article L. 112-4 du Code de la construction et de l'habitation édicte que « toute solution technique peut être mise en œuvre dès lors qu'elle respecte les objectifs généraux prévus par la loi ».

Comment respecter les objectifs généraux ?

En pratique, le maître d'ouvrage va devoir démontrer que le projet respecte les objectifs généraux assignés à la règle concernée. De deux choses l'une, soit la règle comporte des résultats minimaux, qui seront fixés par décret pour chaque champ technique, dans ce cas, le maître d'ouvrage devra prouver l'atteinte de l'objectif en prouvant qu'il atteint les résultats minimaux. Si, en revanche, la règle ne comporte pas de résultats minimaux le maître d'ouvrage justifiera du respect de l'objectif par le recours soit à une solution de référence, définie par voie réglementaire, soit à une solution d'effet équivalent (SEE). Dans cette dernière situation, le maître d'ouvrage pourra utiliser les moyens de son choix pour atteindre les objectifs fixés.

Qu'est-ce que la solution d'effet équivalent (SEE) ?

Le nouvel article L. 112-6 du CCH définit la solution d'effet équivalent comme une « solution technique par laquelle la justification du respect des objectifs généraux assignés dans un champ technique est apportée ». Ainsi, lorsque le maître d'ouvrage souhaite recourir à une solution d'effet équivalent : il doit justifier que la solution retenue respecte les objectifs généraux, fixés par la loi et permette d'atteindre des résultats au moins équivalents à ceux de la solution de référence. Avant la mise en œuvre de cette solution, un organisme tiers offrant des garanties de compétence et d'indépendance évalue la solution pour attester du respect des objectifs. Cette attestation est transmise au ministre chargé de la Construction, avant le dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme ou à l'achèvement des travaux avec le document établit par le contrôleur technique. Ce dernier est chargé, par l'article L. 112- 10 du CCH, d'une mission de vérification particulière. Ainsi, il doit s'assurer de la conformité de la mise en œuvre de la solution d'effet équivalent aux conditions validées par l'attestation de respect des objectifs. Le texte impose que le contrôleur technique n'ait aucun lien avec l'organisme tiers ayant établi l'attestation de respect des objectifs.

Ces règles s'appliquent tant pour les projets de construction que pour les projets de rénovation.

Qui pourra délivrer l'attestation de respect des objectifs ?

La mise en œuvre d'une solution d'effet équivalent implique la production de deux attestations. La première chargée de certifier que la solution permet d'atteindre des résultats au moins équivalents à ceux de la solution de référence. Le texte parle d'attestation de respect des objectifs. L'article L. 112-9 du CCH qu'il s'agit « d'un organisme tiers au maître d'ouvrage offrant des garanties de compétence et d'indépendance ». Le texte ajoute qu'il devra être titulaire d'une assurance couvrant sa responsabilité civile qui pourra être engagée à l'occasion d'un sinistre lié à la solution d'effet équivalent qu'il a évaluée. Toutefois, il n'est pas considéré comme un constructeur au sens de l'article 1792-1 du Code civil.

Un décret en Conseil d'État précisera pour chaque champ technique, les organismes pouvant délivrer l'attestation et les compétences requises pour l'exercice de cette activité.

Comment le non-respect des règles sera sanctionné ?

L'ordonnance confie aux services actuellement chargés du contrôle du respect des règles de construction un pouvoir de police administrative afin de contrôler et sanctionner le respect de la procédure de mise en œuvre des solutions d'effet équivalent. Lorsqu'à l'occasion d'un contrôle, l'autorité administrative constate un manquement aux obligations relatives à la solution d'effet équivalent, elle met en demeure le maître d'ouvrage de satisfaire aux obligations méconnues dans un délai qui ne peut excéder un an. Si le maître d'ouvrage ne se conforme pas à la mise en demeure, l'autorité administrative peut lui infliger une amende au plus égale à 1 500 €.

Comment s'intègre le permis d'innover dans ce nouveau corpus ?

Le permis d'innover a été institué par l'article 88-II de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine. Ce texte a ensuite été modifié par la loi Elan du 23 novembre 2018. À titre expérimental, pour une durée de 7 ans, toute opération de construction ou d'aménagement situé dans un périmètre d'une opération d'intérêt national, d'une grande opération d'urbanisme ou d'une opération de revitalisation du territoire peut contourner toute règle applicable au projet, tant d'urbanisme que de construction à condition de justifier de moyens innovants ou permettant un effet équivalent.

Le permis d'expérimenter est-il abrogé ?

Le permis d'expérimenter ou de faire a été instauré par l'ordonnance dite Essoc 1 du 30 octobre 2018 et deux décrets d'application du 12 mars 2019. Cet outil semble, pour l'heure, avoir été très peu utilisé. Il est maintenu jusqu'à l'entrée en vigueur de l'ordonnance dite Essoc 2.

Quand l'ordonnance Essoc 2 entrera-t-elle en vigueur ?

L'article 8 de l'ordonnance précise que le texte entrera en vigueur à une date fixée par le Conseil er juillet 2021. Un important travail réglementaire doit être réalisé dans ce délai. Par ailleurs, puisqu'il s'agit d'une ordonnance, la ratification parlementaire, nécessaire pour lui donner valeur de loi devrait intervenir avant le 30 avril 2020.

Comment la partie réglementaire va-t-elle être produite ?

Si l'ordonnance reformule et réforme la partie législative, reste la partie réglementaire du Code à mettre en cohérence. Ainsi, par moins de 400 articles sont à modifier, sans compter la définition des résultats minimaux à atteindre. Le Cabinet du ministre chargé de la Ville et du Logement affirme que « ces textes seront co-construit avec les professionnels ». Toutefois, le président du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), Thierry Repentin, à la manœuvre lors de la rédaction de l'ordonnance a annoncé qu'il ne superviserait pas la rédaction de la partie réglementaire. Si ce travail de réécriture minutieux et complexe doit être mené rapidement, la publication de l'ordonnance permet au ministre chargé de la Ville et du Logement d'affirmer « qu'il a enlevé une page sur cinq du Code de la construction ».

POUR EN SAVOIR +

Lire le dossier d'Opérations Immobilières, n° 120

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