Le garant de livraison dispose d’un recours contre le constructeur
le 30/11/2012
Arrêt du 12 septembre 2012 Cour de cassation
La Cour de cassation, troisième chambre civile, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 17 décembre 2010), que le 26 juin 2006, la société Mansio constructions et M. X… ont signé un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan ; que le 22 décembre 2006 la Caisse de garantie immobilière du bâtiment (CGI bâtiment) a délivré une garantie de livraison ; que le maître de l’ouvrage, après constat d’huissier de justice et mise en demeure, a assigné la société Mansio constructions et CGI bâtiment en responsabilité sur le fondement de l’article L. 231-6, II du code de la construction et de l’habitation ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles
Attendu que le contrat de construction de maison individuelle doit comporter l’énonciation des pénalités prévues en cas de retard de livraison ;
Que les stipulations du contrat relatives aux pénalités applicables en cas de retard d’exécution peuvent se référer à des clauses types approuvées par décret en Conseil d’Etat ;
Attendu que, pour condamner la CGI bâtiment, in solidum avec la société Mansio constructions, à payer à M. X… des pénalités de retard, l’arrêt retient que celles-ci seront dues pour la période du 8 août 2009 jusqu’à l’établissement d’un procès-verbal de réception de l’ouvrage sans réserves ou d’un procès-verbal de levée des réserves ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les pénalités de retard prévues par l’article L. 231-2, i) du code de la construction et de l’habitation ont pour terme la livraison de l’ouvrage et non sa réception avec ou sans réserves, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l’
Attendu que les entreprises d’assurance habilitées à pratiquer les opérations de caution ayant fourni un cautionnement, un aval ou une garantie, que ces derniers soient d’origine légale, réglementaire ou conventionnelle, disposent de plein droit et dans tous les cas d’un recours contre le client donneur d’ordre de l’engagement, ses coobligés et les personnes qui se sont portées caution et, pour les paiements effectués au titre de leur engagement, de la subrogation dans les droits du créancier prévue au 3° de l’
Attendu que pour débouter la CGI bâtiment de sa demande dirigée contre la société Mansio constructions en garantie des pénalités de retard qu’elle serait condamnée à régler et en remboursement des sommes versées au maître de l’ouvrage au titre du supplément de prix nécessaire à l’achèvement de l’immeuble en application de la garantie de livraison, l’arrêt retient que la société CGI bâtiment qui a rempli une obligation qui lui était propre en application des dispositions de l’
Qu’en statuant ainsi, alors que l’
Par ces motifs, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :
Casse et annule, mais seulement en ce qu’il condamne la CGI bâtiment, in solidum avec la société Mansio constructions, à payer à M. X… des pénalités de retard, jusqu’à l’établissement d’un procès-verbal de réception de l’ouvrage sans réserves ou d’un procès-verbal de levée des réserves, et débouté la CGI bâtiment de sa demande dirigée contre la société Mansio constructions en garantie des pénalités de retard qu’elle serait condamnée à régler et en remboursement des sommes versées au maître de l’ouvrage au titre du supplément de prix nécessaire à l’achèvement de l’immeuble en application de la garantie de livraison, l’arrêt rendu le 17 décembre 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. X…, à payer la somme de 2 500 euros à la Caisse de garantie immobilière du bâtiment (CGI bâtiment) ; rejette la demande de M. X… ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille douze.
Moyens annexes au présent arrêt
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la Caisse de garantie immobilière du bâtiment (CGI bâtiment).
Premier moyen de cassation
L’arrêt attaqué encourt la censure ;
En ce qu’il a condamné la CGI Batiment, in solidum avec la société Mansio Constructions, à payer à M. X… des pénalités de retard pour la période à compter du 8 août 2009 jusqu’à l’établissement d’un procès-verbal de réception de l’ouvrage sans réserves ou d’un procès-verbal de levée des réserves ;
Aux motifs propres qu’ « il est constant que la date prévue pour la fin des travaux soit le 28 janvier 2008 n’a pas été respectée ; qu’en outre la déduction d’une franchise s’élevant en l’espèce à la somme de 1 743,30 €n’est pas plus contestée par le maître de l’ouvrage ; que la société Mansio Constructions comme la société CGI Bâtiment soutiennent que le montant des pénalités de retard doit être calculé sur le prix de la construction soit 178 977,46 €dont doit être soustrait le coût de l’assurance dommages ouvrages soit la somme de 174 332,46 €qui permet d’aboutir à un montant journalier de pénalités de retard de 58,11 € ; que M. X… fait valoir que rien ne justifie une telle interprétation ; qu’il convient de prendre en compte le détail de l’avenant n° 6 en date du 29 mai 2007, qui après avoir pris en considération les avenants successivement intervenus a arrêté le montant global révisé du contrat à la somme de 174 332,46 €, qu’il convient de retenir dès lors qu’ainsi qu’il a déjà été dit aux termes du contrat du 26 juillet 2006 le coût de l’assurance dommages-ouvrage est exclu ; qu’en conséquence qu’en application tant de l’
Et aux motifs eventuellement adoptes que « le contrat souscrit le 26 juin 2006 stipule en son article 2-7 qu’en cas de retard dans l’achèvement de la construction, une pénalité égale à 1/3000 du prix convenu par jour de retard est due par le constructeur ; qu’en l’espèce, l’achèvement de la construction était fixé au 27 janvier 2008 de telle sorte que les pénalités de retard courent depuis le 28 janvier 2008 et courront jusqu’à l’achèvement des travaux sous la responsabilité de la société CGI ; qu’en l’absence de précision sur la prise en compte dans le prix convenu du coût de l’assurance dommage ouvrage, il convient de calculer les pénalités sur la base de 174 332,46 euros correspondant au prix hors assurance dommage ouvrage ; que le montant de la pénalité journalière s’établit donc à la somme de 58,11 euros ; que le montant des pénalités dues s’établit à la date du jugement soit pour une période de 18 mois et 11 jours, à la somme de 32 483,49 euros (559 x 58,11) ; qu’elles seront dues pour ce montant journalier à compter du 8 août 2008 jusqu’au jour de l’établissement d’un procès-verbal de réception de l’ouvrage sans réserve ou d’un procès-verbal de levée des réserves ; que ces pénalités sont dues par la société Mansion en vertu du contrat mais également par la société CGI, sous réserve d’une franchise de 30 jours équivalent à une somme de 1 743,30 euros, en application de l’article L. 231-6 I c) du code de la construction et de l’habitation précité du fait de la caution solidaire due par celle-ci ; que l’intervention d’un expert à la demande de M. X… pour constater les graves malfaçons avérées ne constitue pas une immixtion du maître de l’ouvrage qui pourrait expliquer le retard dans la réalisation des travaux et autoriser une réduction des pénalités de retard ; que la demande de limitation à 50 % de ces pénalités sera donc rejetée » (jugement, p. 8-9) ;
Alors que les pénalités de retard prévues par l’article L. 231-2, i) du code de la construction et de l’habitation ont pour terme la livraison de l’ouvrage et non sa réception avec ou sans réserves ; qu’au cas d’espèce, en décidant au contraire que les pénalités de retard seraient dues par la CGI Batiment (in solidum avec la société Mansio Contructions) à M. X… pour la période du 8 août 2009 jusqu’à la réception de l’ouvrage sans réserves, ou la levée des réserves, quand les pénalités ne pouvaient être dues que jusqu’à la livraison de l’ouvrage, comme le soutenait du reste la CGI Batiment, les juges du fond ont violé les articles L. 231-2, i) et R. 231-14 du code de la construction et de l’habitation, ensemble l’article L. 231-6, IV du même code.
Deuxième moyen de cassation
L’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, encourt la censure ;
En ce qu’il a débouté la CGI Batiment de sa demande dirigée contre la société Mansio Constructions et visant à ce qu’elle la garantisse des pénalités de retard qu’elle serait condamnée à régler et qu’elle lui rembourse les sommes versées au maître de l’ouvrage au titre du supplément de prix nécessaire à l’achèvement de l’immeuble en application de la garantie de livraison ;
Aux motifs que « la société Cgi Bâtiment sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Mansio Constructions à la garantir des pénalités de retard et à lui rembourser sans limitation le supplément de prix nécessaire à l’achèvement des ouvrages qui resterait à sa charge au delà des sommes payées par le maître de l’ouvrage, qu’elle sollicite par ailleurs sa réformation et demande que le constructeur soit condamné à la garantir de toutes les sommes qui pourraient être mises à sa charge en ce compris les dommages intérêts et les sommes allouées au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qu’au soutien de ces prétentions elle invoque tant le principe de l’autonomie de la volonté que article 12 de la convention de garantie du Janvier 2004 ou encore la subrogation dans les droits du maître de l’ouvrage ; que la société Mansio Constructions s’oppose à ces demandes ; qu’en premier lieu que la garantie ne saurait jouer concernant l’astreinte de 1 000 euros par jour de retard, dès lors que cette condamnation relève de la faute personnelle commise par le garant, qui tarde à exécuter ses obligations ; qu’un garant de livraison, qui remplit une obligation qui lui est personnelle est tenu dans ses rapports avec le constructeur de la charge définitive de la dette qu’il a acquittée à la suite de la défaillance de celui-ci ; qu’en l’espèce la société Cgi Bâtiment qui a rempli une obligation qui lui était propre en application des dispositions de l’article L du code de la construction et de l’habitation ne dispose pas du recours subrogatoire prévu par les articles
Alors que sont applicables aux situations juridiques et aux instances en cours, même à hauteur de cassation, les lois nouvelles qui présentent un caractère interprétatif ; que l’
Troisième moyen de cassation (subsidiaire)
L’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, encourt la censure ;
En ce qu’il a débouté la CGI Batiment de sa demande dirigée contre la société Mansio Constructions et visant à ce qu’elle la garantisse des pénalités de retard qu’elle serait condamnée à régler et qu’elle lui rembourse les sommes versées au maître de l’ouvrage au titre du supplément de prix nécessaire à l’achèvement de l’immeuble en application de la garantie de livraison ;
Aux motifs que « la société CGI Bâtiment sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Mansio Constructions à la garantir des pénalités de retard et à lui rembourser sans limitation le supplément de prix nécessaire à l’achèvement des ouvrages qui resterait à sa charge au delà des sommes payées par le maître de l’ouvrage, qu’elle sollicite par ailleurs sa réformation et demande que le constructeur soit condamné à la garantir de toutes les sommes qui pourraient être mises à sa charge en ce compris les dommages intérêts et les sommes allouées au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qu’au soutien de ces prétentions elle invoque tant le principe de l’autonomie de la volonté que article 12 de la convention de garantie du Janvier 2004 ou encore la subrogation dans les droits du maître de l’ouvrage ; que la société Mansio Constructions s’oppose à ces demandes ; qu’en premier lieu que la garantie ne saurait jouer concernant l’astreinte de 1 000 euros par jour de retard, dès lors que cette condamnation relève de la faute personnelle commise par le garant, qui tarde à exécuter ses obligations ; qu’un garant de livraison, qui remplit une obligation qui lui est personnelle est tenu dans ses rapports avec le constructeur de la charge définitive de la dette qu’il a acquittée à la suite de la défaillance de celui-ci ; qu’en l’espèce la société Cgi Bâtiment qui a rempli une obligation qui lui était propre en application des dispositions de l’article L du code de la construction et de l’habitation ne dispose pas du recours subrogatoire prévu par les articles
Alors que, premièrement, si les règles prévues par les
Et alors que, deuxièmement et subsidiairement, à supposer que l’arrêt attaqué doive être interprété comme n’ayant pas exclu par principe qu’une stipulation contractuelle puisse ouvrir un recours au garant de livraison contre le garanti, mais ait retenu cette solution par interprétation de l’article 12 de la convention de garantie du 19 janvier 2004, il devra alors être censuré pour dénaturation et, partant, violation de l’
En 2006, une société d’assurance fournit une garantie de livraison dans le cadre d’un contrat de construction de maison individuelle (CCMI). La livraison a lieu avec retard et le garant doit supporter des pénalités. Il se retourne alors contre le constructeur. La cour d’appel le déboute : elle estime qu’il a rempli une obligation qui lui est propre et qu’il ne dispose ni d’un recours subrogatoire ni du recours prévu par le contrat, celui-ci ne visant que les sommes payées par le garant pour le compte du constructeur.
Pour la Cour de cassation, le garant de livraison peut exercer un recours contre le constructeur. Les entreprises d’assurance habilitées à pratiquer des opérations de caution bénéficient de la subrogation dans les droits du créancier. L’article 26 de la loi du 10 juillet 2010 a en effet intégré ce recours subrogatoire à l’
La Cour de cassation jugeait, jadis, que le garant n’avait pas de recours contre le constructeur car l’obligation de garantie lui était propre (