
«Le BTP va supporter la moitié des 5 Mds € de baisses d’impôt sur le revenu»
Propos recueillis par Barbara Kiraly | le 13/06/2019 | Jacques Chanut, GNR, FFB, Entreprises, Artisans
Jacques Chanut, le président de la FFB, s'insurge. Lors de son discours de politique générale le Premier ministre a acté une augmentation de la fiscalité de l’ordre de 2,2 milliards d’euros pour le BTP.
Edouard Philippe a annoncé lors de son discours de politiques générales, le 12 juin 2019, des coupes budgétaires sur les entreprises. Comment le BTP va-t-il être impacté ?
Le gouvernement ne reviendra pas sur la suppression de l’avantage fiscal sur le gazole non routier (GNR). Son principe est acté, mais on ne connaît pas encore les modalités de son application. Bercy y travaille. Cela représentera entre 700 et 800 M€ de coûts directs supplémentaires pour nos entreprises du BTP. Mais cela aura aussi des conséquences indirectes sur le coût des matériaux, car le carburant représente 6 à 7% de leur coût d’extraction.
Le Premier ministre a également évoqué la suppression de déduction forfaitaire spécifique…
Depuis 1931, une déduction forfaitaire spécifique allège les charges pour frais les ouvriers et employés, techniciens et agents de maîtrise (Etam), pour prendre en compte le panier repas et les déplacements des compagnons qui se rendent sur le chantier. Cela permet de déduire 10% du salaire brut. La suppression de cet abattement aura un double effet.
D’abord, le salaire brut augmentera, donc les charges sociales qui sont calculées sur cette base aussi, et à la fin, le salaire net diminuera . Cette mesure génèrerait environ 600 M€ de coûts supplémentaires.
"Une hausse de 20% des charges sur le salaire des ouvriers"
Quel sera le second effet pour les entreprises ?
L’augmentation du brut fera automatiquement sortir des ouvriers modestes du dispositif de la réduction Fillon .Cette mesure consiste à réduire une partie des charges des patronales sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic. Elle vise à rendre compétitif les postes aux salaires les moins élevés. Dans une belle entreprise de maçonnerie, environ 80% de la masse de salariale est concernée. Faire franchir une partie de ces salariés au-delà de ce seuil provoquerait un tsunami !
Selon nos calculs sur la masse salariale dans le BTP en 2017, cela représenterait 700M€ de charges supplémentaires. Sans compter que, depuis 2017, la masse salariale a augmenté, tout comme le niveau des salaires.
Les entreprises de la construction sont-elles en mesure de supporter ces efforts ?
Ces mesures représentent une hausse de 20% des charges sur le salaire des ouvriers. Cette annonce va totalement à l’encontre sur la politique de la création d’emploi sur les salaires les plus bas. C’est incompréhensible ! Au total, ces annonces coûteront 2,1 à 2,2 Mds € au secteur. J’ai du mal à comprendre que le BTP, seul, va réaliser la moitié de l’effort pour assurer les 5 Mds € de baisses d’impôt sur le revenu annoncées par le Premier ministre.
Le gouvernement a une vision erronée du secteur. Les PME ont de l’activité mais elles ne gagnent pas d’argent du fait des marges extrêmement faibles. Leur santé économique se dégrade, à tel point, que les assureurs crédits décotent les PME TPE les unes après les autres. C’est bien la preuve qu’il y a un problème de rentabilité.
Comment allez-vous réagir ?
Nous avons un rendez-vous avec le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire la semaine prochaine, et nous allons travailler avec Olivier Dussopt, secrétaire d’Etat en charge de l’Action et des Comptes Publics, qui sera en charge du dossier sur la suppression de déduction forfaitaire spécifique.
Crevette72
14/06/2019 18h:57
Le bâtiment et les TP ont de tout temps bénéficié d'avantages fiscaux (exonération de charges, TVA réduite, et autres). Il serait temps que les grands groupes du secteur renvoient l'ascenseur (Bouygues, Vinci, etc...) Arrêtons les niches fiscales qui mettent à bas les finances publiques et ne servent qu'un petit nombre.