La RE 2020, ou l'art de la débrouille
Premiers à appliquer la nouvelle réglementation, les constructeurs de maisons doivent adapter leurs offres, former leurs équipes et parfois commercialiser des logements sans disposer encore des logiciels.
Barbara Kiraly
Il ne fait pas forcément bon être un constructeur de maisons individuelles (CMIste) par les temps qui courent. En 2020, il y a d'abord eu le durcissement des conditions d'octroi des crédits immobiliers qui a principalement touché les primo-accédants, leur clientèle cible. Puis le confinement en mars, qui a empêché les commerciaux de vendre. L'émergence du zéro artificialisation nette, ensuite. Et enfin, en 2021, la réglementation environnementale (RE) 2020 à anticiper. Les CMIstes seront en effet les premiers à l'appliquer aux permis de construire déposés dès le 1er janvier 2022. Et, donc, à essuyer les plâtres.
Ils ont même déjà commencé puisqu'aujourd'hui, des maisons RE 2020 sont vendues alors que les textes officiels n'ont pas encore été publiés. C'est le cas lorsque les constructeurs savent que le permis de construire ne pourra être déposé avant le 31 décembre 2021. Par exemple, quand une maison à bâtir est commercialisée dans un lotissement dont la déclaration d'achèvement des travaux n'est toujours pas obtenue. « Selon sa taille, les travaux peuvent durer jusqu'à six mois », indique Loïc Vandromme, secrétaire général d'Hexaom.
Version stabilisée du moteur de calcul. Les derniers arbitrages pour la RE 2020, obtenus en mars dernier par les professionnels du bâtiment à force de débats dans le cadre du CSCEE, doivent désormais être pris en compte par les éditeurs informatiques. « Les logiciels commerciaux n’ont pas pu être prêts en avril [comme prévu initialement, NDLR], reconnaît l’entourage de la ministre en charge du logement Emmanuelle Wargon. Nous avons mis à disposition une version stabilisée du moteur de calcul. Les éditeurs doivent s’en saisir maintenant. »
De fait, les bureaux d’études n’ont pas les outils leur permettant de calibrer les projets. « Avec la RT 2012, nous avions vite dégagé un certain nombre de tendances, mais avec la RE 2020, les résultats restent assez aléatoires, déplore Alban Boyé, P-DG de Trecobat. Nous avons travaillé pendant une semaine avec notre bureau d'études [BET], nous avons examiné les maisons de plain-pied, celles à étages, les architecturées, les plus simples… Impossible de trouver une ligne directrice ! Et sans logiciel adapté, les BET travaillent à la main. Ça reste artisanal. Avec la RT 2012, nous avions pris le parti de faire primer l'architecture, et d'adapter la technique. Avec la RE 2020, l'inverse risque de se produire. Cet exercice de style me laisse perplexe… »
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