L'architecture francilienne d'après-guerre se donne en représentation
Une collection de 58 œuvres construites entre 1948 et 2009 à Paris et en Ile-de-France est actuellement mise en scène dans une remarquable exposition coproduite par le Pavillon de l'Arsenal et le centre d'art Georges-Pompidou.
Milena Chessa
A peine le temps de franchir le seuil du Pavillon de l'Arsenal que l'exposition parisienne "Œuvres construites/1948-2009" (*) vous "happe", dixit l'architecte et scénographe Philippe Gazeau. Le regard du visiteur est immédiatement attiré vers le haut, où des dizaines de maquettes reposent sur une simili-pergola orange. "J'avais envie que la halle de l'Arsenal conserve son bel espace, alors j'ai eu l'idée de remplir le vide de la trémie centrale, commente Philippe Gazeau. Comme sur une table d'opération, le public peut ausculter les maquettes sous tous les angles de vue : du dessous, du dessus et sur tous les côtés, grâce à un système dynamique de caméras. Les dessins sont présentés dans des cadres émergeant des parois, un système plus statique afin que le public prenne le temps de les contempler."
Evolutions
"Le Pavillon de l'Arsenal a laissé carte blanche à Philippe Gazeau, qui donne une représentation de l'architecture dont nous n'avons pas l'habitude à Beaubourg, car elle est ici restreinte à un dessin ou une maquette, explique Olivier Cinqualbre, architecte, conservateur au Centre Pompidou et commissaire scientifique de l'exposition. Mais ces documents originaux, ainsi rassemblés par l'Arsenal et Beaubourg, montrent l'évolution de la représentation architecturale, du dessin d'architecte à la maquette numérique."
La photographie d'architecture, elle aussi, évolue. "Nous avons commandé à Vincent Fillon un reportage photographique des bâtiments exposés, raconte Alexandre Labasse, architecte, directeur du Pavillon de l'Arsenal et commissaire scientifique de l'exposition. Au début, il est revenu avec des clichés aux cadrages habituels, sous un beau soleil. Or, nous voulions le point de vue réaliste d'un passant." "J'avais là plus de liberté, plus de possibilités, rétorque Vincent Fillon, photographe de l'exposition. Alors plutôt que de montrer une œuvre décontextualisée, j'ai pu cadrer l'environnement urbain et humain. C'était plus intéressant."
Invitations
Ludique et pédagogique, l'exposition vaut également le détour pour ses nombreuses archives audiovisuelles, essentiellement issues des journaux télévisés stockés à l'Ina et des conférences filmées par le Pavillon de l'Arsenal. Connaissant leurs carrières aujourd'hui, l'amateur d'architecture trouve plaisir à voir et entendre Renzo Piano expliquer le centre national d'art et de culture (pas encore) Georges-Pompidou à Paris en 1971, ou Paul Andreu faire de même au Terminal 1 à l'aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle en 1974, ou encore Dominique Perrault sur le chantier de construction de la Très grande bibliothèque à Paris en 1993, devenue bibliothèque François-Mitterrand depuis. Et tant d'autres encore... L'exposition est une invitation à la redécouverte des petits et grands monuments qui façonnent le cadre de vie quotidien de millions de Franciliens. Alexandre Labasse le dit lui-même : "Allez voir les bâtiments après avoir visité l'exposition!"
(*) Exposition "Œuvres construites/1948-2009. Architectures de collection Paris/Ile-de-France", jusqu'au 28 mars 2010, au Pavillon de l'Arsenal (21, boulevard Morland - 75004 Paris). Entrée libre du mardi au samedi de 10h30 à 18h30, le dimanche de 11h à 19h. www.pavillon-arsenal.com