Urbanisme : Franck Boutté, Grand Prix à énergie positive
A l’occasion de l’édition 2022 de cette récompense décernée par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et le ministère en charge de la Ville et du Logement, le jury entendait émettre un message d’optimisme en privilégiant une personnalité porteuse de solutions. Ingénieur, expert du développement durable, Franck Boutté a convaincu par sa capacité à mêler action et réflexion.
Marie-Douce Albert
Au générique de grands chantiers, aussi bien architecturaux qu’urbains, il est un nom qui apparaît souvent, pas très loin derrière celui du maître d’œuvre en chef. Dans le rôle du conseiller en conception durable, Franck Boutté a ainsi été mentionné aux côtés de Renzo Piano pour l’Ecole normale supérieure de Paris-Saclay, de Paul Andreu et Richez Associés pour la Cité municipale de Bordeaux ou de Sou Fujimoto, pour ses projets français de l’Arbre blanc de Montpellier ou du futur vaisseau Mille Arbres, à Paris.
A plus large échelle, il a œuvré avec les Britanniques de RSHP sur les secteurs parisiens de Bercy-Charenton ou de Maine-Montparnasse et sur la transformation des friches Five Babcock dans la métropole lilloise, avec l’agence AUC.
La reconnaissance des professionnels de la conception lui était déjà acquise. Elle vient d’être confirmée par les jurés du Grand Prix de l’urbanisme. Réunis le 29 juin dernier sous l’égide du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et du ministère en charge de la Ville et du Logement, ses membres ont choisi de décerner à l'ingénieur cette récompense qui lui sera remise en fin d’année.
Figure porteuse de solutions
Pour cette édition 2022, le jury présidé par la Directrice générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), Stéphanie Dupuy-Lyon, entendait envoyer un signal positif. Dans un univers de crises, il s’agissait de dépasser le constat pour mettre en avant une figure porteuse de solutions.
Le jury du Grand Prix de l’urbanisme 2022
• Stéphanie Dupuy-Lyon, directrice générale de l’Aménagement, du logement et de la nature (DGALN), présidente
• Philippe Close, Maire de Bruxelles
• Paola Vigano, urbaniste et Grand Prix de l’Urbanisme 2013
• Eric Bazard, président du club Ville Aménagement
• Alain Bourdin, professeur à l’Ecole d’urbanisme de Paris et directeur de la Revue internationale d’urbanisme
• Fabienne Boudon, Particules, lauréate Palmarès des jeunes urbanistes 2018
• Gérard Penot, urbaniste et Grand prix de l'urbanisme 2015
• Caroline Poulin, l'AUC, Grand prix de l'urbanisme 2021
• Hélène Peskine, secrétaire permanente du Puca
• Marie-Douce Albert, journaliste au Moniteur
• Emeline Cazi, journaliste au Monde
• Aurélie Cousi, directrice chargée de l'Architecture, adjointe au directeur général des patrimoines, ministère de la Culture et de la Communication
Dans cette optique, sept figures de la fabrique urbaine avaient été présélectionnés lors d’un premier tour de discussions : des architectes et urbanistes praticiens, comme Pierre-Alain Trévelo et Antoine Viger-Kohler de l’agence TVK, Claire Schorter ou Simon Teyssou ; un urbaniste façon entrepreneur social, Nicolas Detrie, qui comme cofondateur de Yes We camp a été une figure pionnière de l’urbanisme transitoire ; la directrice générale l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), Dominique Alba ; le philosophe et chercheur en architecture Sébastien Marot et donc, Franck Boutté, fondateur en 2007 de l’agence de conception et ingénierie qui porte son nom.
Ce dernier a alors remporté les suffrages en raison de sa capacité à croiser action et réflexion, à établir une méthodologie sans nier les contraintes particulières du contexte et à envisager le projet avec l’approche la plus transversale possible.
Né en 1968 à Boulogne-sur-Mer, Franck Boutté avait dès le départ choisi la transdisciplinarité. Ingénieur civil diplômé des Ponts et Chaussées en 1992, il a aussi été formé à l’architecture en suivant les enseignements de l’école de Belleville. Très vite, il a eu à s’intéresser aux domaines encore émergents de la performance énergétique des bâtiments et plus largement de qualité environnementale dans la construction.
Contre la «tyrannie du bien»
Depuis lors, il a travaillé avec de nombreux architectes en plaidant pour une prise en compte des enjeux écologiques dès les premières étapes d’élaboration des projets. Pour lui, l’environnement doit être inscrit «dans l’ADN même» des bâtiments en devenir.
Puis dès la fin des années 2000, il a œuvré à faire passer l’exigence à plus vaste échelle, en prônant une conception vertueuse des territoires dans leur ensemble. Il s’est alors montré critique envers le modèle des écoquartiers, selon lui, trop souvent pensés comme de simples juxtapositions d’édifices durables mais inaptes à faire ville.
Capable, avec son équipe, de dispenser des conseils en climatique, en aéraulique, en photovoltaïque et de mettre les projets en conformité avec toutes les RT successives, Franck Boutté assure cependant ne pas avoir le culte de la performance.
En 2009, dans une interview filmée pour le Pavillon de l’Arsenal, il mettait ainsi en garde contre une «tyrannie du bien». A force de réglementations et de calculs, des villes optimales sur les tableaux Excel pouvaient sans doute émerger mais, affirmait-il, les gens n’auraient aucunement envie d’y habiter.
Intervenant sur des sujets complexes, de haute technicité, Franck Boutté est conscient de son devoir de pédagogie. Dans son autobiographie scientifique, rédigée à l’attention du jury du Grand prix, il note ainsi : «les questions de transitions, d’énergie, de carbone sur lesquelles j’interviens sont difficiles à appréhender et à représenter. C’est une des spécificités de l’approche que j’ai construite à l’agence : rendre visible l’invisible, par la parole, le texte et le dessin.» En le plaçant cette fois en tête du générique, cette récompense lui donne une occasion de diffuser encore un peu plus largement le message.
Palmarès des jeunes urbanistes : quatre lauréats
Réuni le 6 juillet 2022 à l’initiative du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et du ministère en charge de la Ville et du Logement, le jury du Palmarès des jeunes urbanistes a distingué quatre lauréats sur les 27 candidatures réceptionnées. Les diplômes leur seront remis à la fin de l'année 2022 à l'occasion de la célébration du Grand Prix de l’urbanisme.
Belvédère
Agence de programmation urbaine et de stratégie territoriale, Belvedere se revendique d’un certain urbanisme tactique, capable, par le choix partagé d’un ensemble d’objectifs et de moyens, d’inscrire un projet en résonance avec une trajectoire vertueuse des territoires.
Les Marneurs
Cofondée en 2016 par trois associés, architectes et paysagistes et basée à Paris et Bruxelles, l'agence Les Marneurs travaille particulièrement sur les problématiques littorales liées au risque de submersion marine et d’inondation.
Commune
Les sept associés de l'agence d’architecture fondée à Lyon en 2019, tous architectes, sont aussi pour certains philosophes, docteurs, gérants d’une librairie spécialisée, enseignants. A la croisée de la recherche et du projet, de la théorie et de la pratique, l’agence mobilise les habitants, les usagers, le « déjà-là » pour ancrer ses propositions dans une réalité des pratiques locales. Le travail en résidence, et le dessin sensible au service du projet sont revendiqués comme les dispositifs fondateurs de son action.
La Traverse
Créée à Poitiers en 2019, La Traverse se définit comme une structure d'appui aux dynamiques de transition écologique et sociale dans les territoires. Collectif de 10 personnes engagé dans l’accompagnement des territoires ruraux « résilients », La Traverse cherche à poser les bases d’une « transition écologique juste et radicale » analysée comme nécessaire et urgente.
Le jury du Palmarès des jeunes urbanistes 2022
• Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur de l’aménagement durable à la DGALN, président
• Corinne Langlois, sous-directrice à l'Architecture, à la Qualité de la construction et du cadre de vie, ministère de la Culture
• Jean-Baptiste Marie, directeur de Popsu et du GIP Epau, Puca
• Simon Teyssou, directeur de l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Clermont-Ferrand
• Marie-Christine Vatov, rédactrice en chef de la revue Traits urbains
• Delphine Négrier, Alphaville, (PJU 2007)
• Clément Bollinger, Caudex (PJU 2018)
• Nicolas Détrie, Bataille, (PJU 2020)
• Guillaume Hébert, Une Fabrique de la ville
• Pascal Amphoux, Ecole Polytechnique de Lausanne
• Hugo Réveillac, président du Collectif national des jeunes urbanistes
Urbanisme : Franck Boutté, Grand Prix à énergie positive
Tous les champs sont obligatoires
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