Forte houle sur le logement neuf
Pour le Pôle Habitat FFB, le développement du secteur du logement neuf est contrarié par la RE 2020, la hausse du prix des matériaux et de l’énergie, mais aussi par la loi « Climat et résilience » et de multiples freins en zones tendues.
Laurent Duguet
Hasard du calendrier, c’est quelques heures après l’invasion russe en Ukraine que le Pôle Habitat FFB organisait, le 24 février, une conférence de presse sur le bilan 2021 et les perspectives de l’activité du logement neuf. Autant dire que l’ambiance n’était pas à l’euphorie, surtout avec des chiffres qualifiés de « trompe l’oeil » par Christophe Boucaux, délégué général du Pôle Habitat FFB.
Côté pile, les nouvelles pourraient pourtant être considérées comme encourageantes : rebond des ventes de la maison neuve en secteur diffus depuis un an (+ 21,5 %) avec une forte croissance dans certaines régions (+ 30,5 dans le Centre-Val de Loire) ; un niveau d’autorisations de logements neufs en hausse (+ 25,3 % sur 12 mois glissants en individuel et + 13,9 % dans le collectif), tout comme pour les mises en chantiers (+ 13,7 % en individuel et + 8,9 % en collectif). Même les prévisions 2022 pourraient faire croire à une embellie entre une croissance prévue de 7 % pour le chiffre d’affaires du bâtiment en logement neuf et une croissance « légère » des démarrages de chantiers qui permettraient de se rapprocher de 400 000 unités cette année.
La « digue de l’individuel » sur le point de céder
Pourtant, côté face, l’heure n’est pas à la fête. Depuis trois mois, le marché de la maison neuve en secteur diffus dévisse fortement, avec une baisse de 14 % des ventes sur trois mois glissants, sans parler « d’affolement des prix du logement » depuis 2017 : + 9,5 % pour la maison en diffus, + 26 % pour la maison groupée et + 11,5 % pour le logement collectif. Quant à l’index BT 01 (tous corps d'état), il s’affichait, fin novembre, avec une augmentation de 5,2 % sur 11 mois, sans perspective de stabilisation à court terme.
Pour Gregory Monod, président du Pôle Habitat FFB, « les événements récents en Ukraine, les surcoûts liés à la RE 2020, à la hausse des prix des matériaux et de l’énergie, la tendance haussière des taux de crédits immobiliers, la transformation en réglementation des recommandations des Haut Conseil de Stabilité Financière et la mise en oeuvre du principe du zéro artificialisation nette, sont en train de faire céder la digue de l’individuel diffus ».
Des propositions
Pour enrayer ces perspectives, plusieurs propositions « urgentes » ont été présentées afin de « relancer vraiment la construction neuve » : « Dans le cadre de la Commission Rebsamen (pour la relance durable de la construction de logements), nous souhaitons la mise en place de commissions locales de médiation, le contrôle du respect des objectifs fixés par les PLH avec l’instauration d’un mécanisme de sanctions en cas de carence manifeste, ainsi que l’accélération du traitement des recours liés aux refus ou au retrait des autorisations d’urbanisme, qui ont proliféré en 2021 ».
Pour absorber les surcoûts de la RE 2020, le Pôle Habitat demande le rétablissement du PTZ avec une quotité de 40 % mais « sans discrimination territoriale » ainsi que l’instauration d’un crédit d’impôt de 15 % sur les cinq premières annuités d’emprunt. Pour Grégory Monod, cette dernière mesure « est très différente de celle prise sous la présidence de Nicolas Sarkozy, en 2011, et devrait avoir un effet levier permettant de resolvabiliser les ménages ».
L’inquiétude sur la RE 2020 était cependant palpable : « Si reconsidérer la trajectoire de de cette réglementation n’est pas envisageable, nous craignons que les sauts triennaux entraînent une spirale inflationniste et empêchent les constructeurs d’avoir le temps de bénéficier d’une phase d’apprentissage », a encore ajouté le président du Pôle Habitat FFB, qui a, en outre, demandé la création d’un observatoire sur la mise en place de la RE 2020.
Enfin, l’organisation professionnelle a contesté la définition de l’artificialisation des sols, indiquant « que l’habitat, qui représente 42 % des surfaces artificialisés estimées, est en fait constitué à 55 % de sols enherbés ou nus, majoritairement perméables et constituant des réservoirs de biodiversité ».
En cette de campagne électorale, les candidats à l’élection présidentielle n’ont pas vraiment été interpellés par le Pôle Habitat : « Le logement est actuellement absent des débats alors qu’il représente un vecteur de gain de pouvoir d’achat, a constaté Gregory Monod. Peut-être est-ce un sujet trop technique pour voir les candidats en débattre entre eux, mais nous aurions apprécié des propositions fortes de leur part pour relancer la construction ».
Si l’expression de « long hiver » a été employé pour qualifier notamment le secteur de la promotion immobilière, il est probable que le « printemps » du logement neuf se fasse attendre en 2022.
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