Dexia dans la tourmente malgré elle
Defawe Philippe
La chute brutale en bourse de la banque franco-belge, acteur majeur du financement des collectivités locales a obligé les autorités belges et françaises à réagir.
Lundi 29 septembre, l'action de Dexia à la Bourse de Paris a chuté de 27,11% à 7,34 euros vers 15h35. Un décrochage intervenu après la nationalisation partielle de Fortis, le bancassureur belgo-néerlandais, menacé d'effondrement par la crise financière. Les investisseurs ont alors craint que Dexia ne soit prise à son tour dans la tourmente. Un article du quotidien Le Figaro, selon lequel une augmentation de capital de Dexia pourrait être annoncée très rapidement, a accentué la défiance.
Panique irrationnelle selon les experts
La banque a tenté de calmer la tempête en démentant rencontrer des problèmes pour se financer sur le marché. "C'est un groupe très solide au niveau du capital", a assuré une porte-parole, "mais la situation est tellement exceptionnelle (sur les marchés) qu'il faut suivre l'évolution à tout moment". Une panique autour de l'établissement franco-belge qui a également laissé les analystes dubitatifs. "C'est du pur énervement des marchés", estimait Pierre Flabbée, analyste chez Landsbanki-Kepler. "C'est un peu irrationnel. Dans le prolongement de la chute de Fortis, on craint que Dexia soit la prochaine touchée. En réalité, on n'en sait rien", ajoutait un analyste d'une maison de courtage sous couvert de l'anonymat.
Craintes pour les collectivités locales françaises
Alors que le ministre belge des Finances Didier Reynders s'est dit immédiatement prêt, dans la matinée, à apporter à Dexia son aide en cas de difficultés, en France, son homologue, Christine Lagarde, a fait savoir que la Caisse des dépôts "prendra ses responsabilités en tant qu'actionnaire" de Dexia. La CDC, considérée comme le "bras financier" de l'Etat, détient en effet environ 11% du capital de la banque franco-belge, selon les services de Bercy. Elle gère au total plusieurs dizaines de milliards d'euros, investis notamment dans les plus grands groupes français, les collectivités locales, ainsi que d'importants régimes publics de retraite, et finance le logement social. Mme Lagarde a en outre rappelé qu'il n'y avait "pas de risque" pour les déposants français puisque "Dexia n'a pas de déposants en France".
Adrien Pouthier et Jean-Philippe Defawe, avec AFP
DEXIA
Née en 1996 de la fusion du Crédit Local de France et du Crédit Communal de Belgique, la banque franco-belge Dexia est spécialisée dans les prêts aux collectivités locales, dont elle se dit le "leader mondial". Elle n'a pas de particuliers parmi ses clients en France.
SIEGE SOCIAL- Paris et Bruxelles. Actuellement société de droit belge, Dexia prendra le statut de société européenne d'ici à la fin 2008.
ACTIVITES - Services financiers aux collectivités locales dans plus de 30 pays dans le monde, notamment des prêts, financements d'infrastructures et assurances d'émission d'obligations (54% du bénéfice net en 2007); services financiers aux particuliers (28% du bénéfice net); gestion d'actifs; services aux investisseurs; activités sur les marchés financiers.
EFFECTIFS - Plus de 35.000 employés dans 37 pays, dont 5.000 en France.
CLIENTS- Dexia compte 5,5 millions de clients particuliers. La banque dispose de 994 agences en Belgique, 40 au Luxembourg et 52 en Slovaquie. Sa filiale turque, Denizbank, compte 320 agences. En France, le groupe détient une participation de 20% dans Crédit du Nord.
ACTIONNAIRES- Le groupe belge de service financier Arcofin (17,7%), les communes belges (16,2%), la Caisse des dépôts et consignations (11,7%), la mutuelle belge Ethias (6,3%), l'assureur français CNP (2%), les salariés (3,8%).
PDG- Axel Miller, 42 ans, avocat belge spécialisé en droit financier. Il a succédé à Pierre Richard à la tête du groupe le 1er janvier 2006. En novembre 2007, M. Miller avait affirmé que son établissement était "très bien positionné" pour tirer parti de certaines conséquences de la crise des marchés de crédit.
RESULTATS FINANCIERS- Le bénéfice net a reculé de 32,4% au deuxième trimestre 2008 à 532 millions d'euros. Le chiffre d'affaires a crû de 1,4% à 1,964 milliard d'euros.