Devant les intercos, le gouvernement joue l’apaisement
Alors que le dialogue avec plusieurs collectivités territoriales se crispe, le gouvernement avait dépêché trois de ses membres à Nantes, la semaine dernière, pour défendre ses choix devant la convention de l’Association des communautés de France (ADCF).
Jessica Ibelaïdene
« A l’ADCF, nous refusons le manichéisme, nous sommes profondément girondins. » Alors qu’il s’apprêtait à passer le flambeau à Jean-Luc Rigaut, le désormais ex-président Charles-Eric Lemaignen a donné le ton en ouverture de la 28e convention de l’association, qui se tenait à Nantes les 5 et 6 octobre. S’adressant à une assemblée de plus de 1500 personnes, parmi lesquelles les ministres Jacques Mézard et Jacqueline Gourault, il a placé cette convention sous le signe du dialogue avec l’Etat.
Une façon de se distinguer dans le paysage actuel, puisque les régions ont claqué la porte de la conférence des territoires, et les départements refusent de signer tout contrat avec l’Etat pour le moment. Mais « la liste des sujets contentieux commence à s’allonger, remarque le nouveau président de l’ADCF, Jean-Luc Rigaut. Et nous devons dire stop quand il le faut ».
Ouverts à la discussion, mais vigilants donc, les membres de l’ADCF ont écouté avec attention les discours du ministre de la Cohésion des Territoires, de la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, qui a notamment lancé une pique aux régions et aux départements (« comment peut-on demander des réformes et des revendications en refusant tout dialogue avec l’Etat »), et du Premier ministre Edouard Philippe. L'objectif était de ne pas repartir fâchés, même en évoquant certaines questions épineuses, chacun s'est attaché à donner quelques gages aux intercos.
"Un travail de dentelle"
Quelques annonces ou précisions ont ainsi émaillé leurs différents discours. C’est notamment le cas sur la contractualisation entre l’Etat et les 319 plus grandes collectivités locales – dont 72 intercommunalités -, « qui représente 70% de la dépense publique locale, rappelle Jacqueline Gourault. Il s’agit de contrôler la courbe des dépenses de fonctionnement pour ne pas qu’elle dépasse une croissance de 1,2% année après année, dans ces territoires ».
Elle a assuré que ces contrats seraient étudiés en fonction de la situation particulière des collectivités locales, de l’évolution de leur démographie, des efforts déjà réalisés. « C’est un travail de dentelle que le gouvernement va réaliser pour concilier maîtrise des dépenses et réalités locales. » Rien n’est encore décidé pour les collectivités hors contrat, mais les réflexions se poursuivent.
Jacques Mézard, de son côté, a voulu assurer du soutien de l’Etat envers l’investissement local. « Les crédits mobilisés en 2017 sont maintenus. C’est le cas de la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), la Dotation de la politique de la ville (DPV) est reconduite en 2018, la Dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) est pérennisée et son architecture est simplifiée. » Les seuils pour cette dernière sont supprimés, « tout projet pourra y avoir accès », ce qui doit favoriser les territoires ruraux notamment, explique Jacqueline Gourault qui vante une enveloppe globale de 1,8 milliard d’euros pour les trois fonds.
L'eau s'invite dans le débat
Autre sujet de tension dans les intercos, la problématique de l’eau. Et notamment la mise en place de la compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention inondation), qui doit être transférée aux intercos le 1er janvier 2018. Mais « la mise en œuvre de la loi Notre soulève quelques difficultés auxquelles il faut répondre », reconnaît le Premier ministre.
Dans cette optique, Jacqueline Gourault a annoncé aux membres de l’ADCF que le gouvernement reviendrait, non pas sur le transfert de la compétence, mais sur « quelques points de la législation, sur les modalités de sa mise en place. Il y a notamment des questions non réglées sur les zones littorales et les grands corridors fluviaux, ainsi que sur le financement ». Projet ou proposition de loi, peu de chance que le texte soit prêt et voté avant le 1er janvier. Mais il est espéré pour le premier trimestre. L’eau et l’assainissement feront aussi l’objet de réflexion.
Enfin, Jacques Mézard a répondu à une autre inquiétude, touchant l’investissement dans le numérique. « Nous avons réuni plusieurs fois les opérateurs télécoms. Ils sont d’accord pour avoir des engagements contraignants en termes de couverture numérique, afin d’atteindre les objectifs fixés par le président de la République – du bon haut débit pour tous en 2020, NDLR. Dans les réseaux d’initiative publique, ils ne pourront pas développer leurs lignes en parallèle et mettre en danger les investissements des pouvoirs publics. Ce n’est pas négociable, le message est passé. » De quoi rassurer bon nombre d’acteurs, au-delà des collectivités locales.
Devant les intercos, le gouvernement joue l’apaisement
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