Bureaux de contrôle : la question de l’accès aux marchés publics rebondit
Par une décision du 19 octobre 2012, le Conseil d’Etat clarifie la portée à donner à la règle d’incompatibilité de l’activité de contrôle technique avec l’exercice de missions de conception ou d’expertise.
Sophie d'Auzon
La présence dans le groupe auquel elle appartient d’une filiale exerçant des activités de contrôle technique n’empêche pas une société de candidater à un marché public de diagnostic de structure d’un ensemble immobilier, estime le Conseil d’Etat dans un arrêt du 19 octobre dernier.
Cet épisode est le énième d’un feuilleton qui oppose régulièrement bureaux de contrôle et bureaux d’études devant les tribunaux. Il offre au Conseil d’Etat l’occasion de clarifier sa position. Ce dernier avait en effet jugé, en 2010, qu’une société titulaire d’un agrément de contrôle technique ne pouvait être attributaire d’un marché de diagnostic de sécurité incendie (1). Et ce, en raison de l’article L. 111-25 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) qui énonce l’incompatibilité de l’activité de contrôle technique avec « l’exercice de toute activité de conception, d’exécution ou d’expertise d’un ouvrage ». Plus récemment (le 10 avril 2012), la cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu une décision dans le même sens (
lire notre article
).
La candidate n’était pas agréée elle-même pour exercer le contrôle technique
Mais une question – au moins – restait débattue : l’existence de liens juridiques avec un bureau de contrôle prive-t-elle également de l’accès à ce type de marchés ?
Le Conseil d’Etat y répond, par la négative, dans un arrêt du 19 octobre 2012. La société Qualiconsult Sécurité avait répondu à un marché public portant sur le diagnostic de structure d’un ensemble immobilier. Sa candidature avait été rejetée par le pouvoir adjudicateur au motif « qu’elle ne pouvait prétendre à l’exercice d’une activité incompatible, en vertu des dispositions de l’article L. 111-25 du CCH, avec les activités de contrôle technique exercées au sein du même groupe par une autre société filiale. »
La société ainsi évincée a saisi le juge des référés, qui lui a donné raison et a annulé la procédure de passation litigieuse. Même succès ensuite devant le Conseil d’Etat, qui énonce clairement que la règle d’incompatibilité « ne s’applique qu’aux sociétés de contrôle technique et non aux sociétés exerçant d’autres activités dans le domaine de la construction. » Il relève que la société Qualiconsult Sécurité « n’était pas agréée en vue d’exercer une activité exclusive de contrôle technique », et que « précisément, elle s’était portée candidate à l’attribution d’un marché d’expertise dans le domaine de la construction et non d’un marché de prestations de contrôle technique ». C’est donc à tort qu’elle a été évincée par le maître d’ouvrage public.
Cette décision valide la stratégie adoptée par le groupe Qualiconsult consistant à créer des structures spécifiques (comme Qualiconsult Sécurité) pour éviter toute confusion des genres. Son président Jean-Christophe Protais expliquait dans un article paru le 6 juillet dernier dans « Le Moniteur » : « Nous avons encapsulé nos métiers dans des structures dédiées, avec des compétences propres. Le seul lien entre nos activités reste nos clients. »
Rappelons en revanche que l’association en co-traitance d’un bureau de contrôle et d’un bureau d’études ne permet pas de répondre à un marché concerné par la règle d’incompatibilité. C’est ce qu’a précisé la cour de Bordeaux dans l’arrêt du 10 avril 2012 précité.
Pour consulter l’arrêt CE, 19 octobre 2012, n° 361459, cliquez ici.
Pour lire le point de vue de Frédéric Lafage, CICF (Chambre de l'ingénierie et du Conseil de France), sur cette décision, cliquez ici.
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